« Blessé, il est arrivé » ou l’amour monstre

Pus qu’un roman, Blessé il est arrivé de Rodolphe Viémont est un cri de désespoir et d’amour, comme si l’adulte laissait jaillir tout les tourments d’adolescents coincé en lui, aussi bien que la sage déclaration d’amour à son cadre de vie, les douces rives angevines.

Dimitri est un jeune poète, mais surtout un écorché vif et un coeur d’artichaut. Artaud n’est pas loin. Sitôt qu’une femme s’intéresse à lui, il devient un chien enragé, incontrôlable, prêt à tout donner. Alors quand la jeune Chiara lui écris d’abord pour vanter ses poèmes et s’en dire bouleversée, le jeu de l’amour monstre se met en marche, inexorablement.

S’opposent alors deux mondes : l’agitation parisienne et la paix angevine. La création fiévreuse et la douceur de recevoir. L’effervescence et la patience calme. Cette dualité pose aussi la relation amoureuse comme aussi une relation d’apprentissage, entre le maître et sa disciple, la différence d’âge entre les deux formant un obstacle et un motif d’excitation supplémentaire, car la jeune fille est bien plus que cette douceur qu’elle affiche, et finira sans doute par dominer. Cet amour pose un duo tragique auquel viennent se mêler d’autres personnages, d’autres musiques, comme si la vie imposait aux amants de n’être jamais seuls…

Son destin de martyr, de suicidé, d’élégant romantique attendrait la prochaine crise. Là, tout n’était que carnage ridicule. »

Ceux qui connaissent le travail de réalisateur de Rodolphe Viémont retrouveront certaines de ses lubies, comme le thème du liquide, mais on découvrira un auteur qui met tout son coeur — et ses maladresses aussi, car souvent dans un premier roman on veut tout mettre et trop — et affronte les blessures de l’amour monstre aussi bien que la vérité d’une force nouvelle qu’on croyait ne pas pouvoir naître en soit.

Texte entrecoupé de poèmes et de chansons (notamment la voix omniprésente d’un Jim Morrison), Blessé il est arrivé est une histoire d’amour, de désamour, du deuil et de l’envie d’essayer de vivre malgré tout, malgré soi, malgré ses failles, malgré l’autre, cet espoir d’être ce tout assez beau pour combler l’immense vide en soi.

Loïc Di Stefano

Rodophle Viémont, Blessé, il est arrivé, fond encre, novembre 2018, 176 pages, 18 eur

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