« Devil’s Relics », le pire du shônen façon Maître Gims

Quand, avec son frère, on a la passion du manga depuis son plus jeune âge, il est plus facile de la faire aboutir dans son propre projet si l’on s’appelle Maître Gims, chanteur iconique de la scène variéto-rap française. Et c’est aussi un bon coup commercial pour l’éditeur. Mais est-ce un bon manga ? Qu’une star soit au scénario et au chara-design suffit-il ? Devil’s relics a mis 20 ans à parvenir jusqu’à nous… las, on pouvait attendre encore un peu…

 

Ken le survivant

Il y a chez Maître Gims cet archétype genré du mâle puissant, du moins dans l’image publique qu’il renvoie. Et cela se retrouve dans l’univers assez binaire de Devil’s Relics, où d’un côté se trouve Kaïs et de l’autre des méchants. Kaïs est un super-combattant, mais qui n’aime pas se battre : il ne le fait que pour aider les faibles, notamment sa tante, à qui il doit tout. Face à lui, des méchants, donc, en deux équipes. Première équipe, les policiers qui ne sont qu’une horde de pourris rackettant les plus faibles et participants aux trafics et combats truqués (ils apprécieront…). Seconde équipe, cinq super-vilains chacun doté d’un pouvoir élémentaire et d’un nom stupide (Le Maître du vent, HyPnOz, King Baraba, Capitaine Fire Fire…) qui s’unissent contre Kaïs pour récupérer la relique qu’il vient juste de voler à un mystérieux commissaire priseur.

Aux côtés de Kaïs, deux acolytes, comme il en faut. Une jolie lanceuse de couteaux et un gamin surdoué au tir. Deux faire-valoir de l’homme fort, la belle et le gamin…

Cette simplification du monde, où tout est très sombre (le monde est un désert au centre duquel une ville-usine asservit les humains), la seule lumière serait Kaïs, porteur d’espoir pour l’humanité, sauveur des faibles, etc., n’a aucune épaisseur. Un carton-pâte mal copié sur les pires nanars du genre post-apocalyptique !

C’est dire que dans l’esprit de Maître Gims le shônen n’a pas évolué depuis les années 80…

 

 

La quête des reliques

Marqué par Dragon Ball, Devil’s Relic emmène le lecteur dans une quête aux reliques laissées sur terre par le Diable lui-même. On imagine quelle puissance elles offriraient et que Kaïs va tout faire pour qu’elles ne tombent pas dans de vilaines mains. A lui les belles boules de cristal ! Du moins on va simplement l’imaginer, car le premier tome pose les bases d’un univers dont on n’a pas la moindre envie de savoir comment il se développe.

 

Archi-grévé de poncifs éculés et d’une « philosophie » nanardesque en diable (le manga s’ouvre sur la formule « les racines du futur germent dans le présent » qu’on voudra bien méditer…), Devil’s relics est un calvaire que même les illustrations pauvres et stéréotypées ne sauvent pas. Peut-être les fans du chanteur y trouveront-ils ce qui nous a échappé… — mais ce manga ne vaut pas le quart d’heure de lecture qu’on y a consacré. Et pire, on en viendrait presque à préférer que Maitre Gims « chante »… On souhaite cependant une belle opération commerciale aux éditeurs.

 

Loïc Di Stefano

Maître Gims et son frère Darcy (idée originale, chara-design, scénario), Jean-David Morvan (scénario), Yoshiyasu Tamura (dessin), Devil’s relics, tome 1,  Glénat et Fayard, octobre 2018, 192 pages, 6,90 euros

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