« Les Grands procès » : Emmanuel Pierrat, chroniqueur judiciaire

Endossant les habits d’une manière de Paul Lefèvre, célèbre chroniqueur judiciaire qui sait comme personne vous faire vivre un fait-divers, Emmanuel Pierrat se lance dans une série de récits de procès célèbres. Initialement publié en volume (Les Grands procès de l’Histoire, La Marinière, 2015), Points les re-publie deux par deux dans un fourreau noir du plus bel effet.

Un avocat du livre

Maître Emmanuel Pierrat est avocat, spécialiste du droit d’auteur et du droit de l’édition, pour les clients qu’il défend. Mais pour la partie de son œuvre publiée, vaste s’il en est, on remarquera son appétence pour les sujets interdits, l’érotisme, les dessous de la justice, la franc-maçonnerie. Si son œuvre littéraire propre peut sans trop de mal être oubliée, son travail de vulgarisation de ses domaines de prédilection est vraiment intéressant et permet de mettre en lumière, et sans trop de souffre, des pans entiers de la culture que de trop prudes esprits voudraient volontiers forclore.

Signalons également son travail d’essayiste de la libre pensée, qui va finalement bien avec l’ensemble de son œuvre, et notamment son essai La Liberté sans expression ? Jusqu’où peut-on tout dire, écrire, dessiner ? (Flammarion, 2015), d’une lecture vraiment éclairante.

 

Maître fait-diversier

Résumer un grand procès en si peu de pages n’est pas un mince exercice. Il faut rappeler tous les faits, les rebondissements, mais aussi donner à sentir l’odeur particulière à chaque affaire. Et, surtout, montrer en quoi ces affaires sont symptomatiques du droit, de leur temps, de la bassesse des hommes ou simplement d’une déviance qui va se reproduire d’année en année.

S’il s’agit plus de récits d’affaires que de procès proprement dit (qu’on n’attende pas donc de déroulé des plaidoiries, l’ambiance à la barre, etc.), ces récits courts pour mordus des faits-divers sont vraiment bien construits et finalement très complets. Que leur manque-t-il ? des détails, des pièces, des témoignages, rien qui ne viennent contrarier le fil du récit.

Emmanuel Pierrat réussit avec brio à emporter son lecteur dans ces récits courts et intelligents dans lesquels il résume parfaitement l’odeur propre à tel dossier. Une très bonne manière de faire ses premiers pas dans ces affaires et d’apprécier les faits-divers.

 

Loïc Di Stefano

 

Volumes déjà parus (présentations de l’éditeur) :

 

« J’accuse », L’affaire Dreyfus (1894) suivi de  «surtout ne confiez pas les enfants à la préfecture », l’Affaire Papon (1997), 60 pages, 3 euros

  • L’affaire Dreyfus, en 1894, commence par l’accusation de trahison d’un capitaine juif. Le plaidoyer d’Émile Zola contre l’antisémitisme est resté célèbre. Le procès fut hors normes, ses conséquences judiciaires, politiques et sociales sans précédent.
  • En 1981, Le Canard enchaîné révèle que Maurice Papon, alors ministre du Budget, aurait activement participé à la déportation de milliers de Juifs sous le gouvernement de Vichy. Seize ans plus tard, le procès a enfin lieu, l’affaire Papon réveille de vieux fantômes.

 

« Omar m’a tué », L’affaire Raddad (1994) suivi de « Il pleure, il pleure ! », L’affaire Troppmann (1869), 44 pages, 3 euros

  • En 1991, Ghislaine Marchal est retrouvée morte dans sa villa, sur les hauteurs de Mougins. Une inscription en lettres de sang désigne le coupable : « Omar m’a tuer ». Le cas semble trop simple, les incohérences sont nombreuses : l’affaire Raddad va connaître un immense écho.
  • En 1869, une femme et cinq enfants sont découverts par un paysan. Deux autres membres de la famille ont eux aussi été assassinés. Le meurtrier semble sans affect, l’affaire Troppmannsoulève émoi et indignation et lancera les débuts de la presse à sensation.

 

« Juger Mai 68 », L’affaire Goldman (1974) suivi de « J’ai choisi la liberté », L’affaire Kravchenko (1949), 45 pages, 3 euros

  • Intellectuel d’extrême gauche, auteur de plusieurs vols à main armée, Pierre Goldman est arrêté en 1974 pour un double meurtre. Condamné à perpétuité puis acquitté, l’affaire Goldman aura vu le soutien de nombreuses personnalités intellectuelles et politiques.
  • L’affaire Kravchenko, en 1949, connut un intense retentissement : c’était la première tribune des victimes de la barbarie stalinienne. Alors qualifié de « procès du siècle », témoins et avocats tendirent à prouver l’existence des goulags, sept ans avant le rapport Khrouchtchev.

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