Louis XIX, duc d’Angoulême : un destin manqué

Couverture du livre Louis XIX, duc d’AngoulêmeLouis XIX ? D’ordinaire, la succession des Rois de France s’arrête à Charles X, détrôné par la Révolution de 1830. Louis XIX est en fait son fils, le duc d’Angoulême, qui renonça au trône sous la pression paternelle. De lui, le grand public ne sait rien. Les promeneurs de la place du Trocadéro ignorent sans doute que le nom de ce lieu-dit parisien provient d’une victoire remportée en Espagne par le duc d’Angoulême…

 

 Un auteur inconnu

De François de Coustin, conseiller pour le patrimoine, qui a travaillé pour la banque de France, l’amateur d’histoire ne sait rien, comme de Louis XIX d’ailleurs ! Après recherches, on découvre que de Coustin a publié un ouvrage, Gens de noblesse, chez Flammarion en 1992. Dans ses remerciements, il cite Thierry Lentz et Laurent Theis : on a connu pire comme compagnonnage ! Choisir un personnage obscur comme Louis-Antoine, fils de Monsieur le comte d’Artois et futur Charles X, peut étonner tant la figure de ce « Fils de France » paraît de prime abord bien pâlotte.

 

Un Bourbon de deuxième catégorie

Quand il naît en 1775, Louis-Antoine, duc d’Angoulême, devient de fait un héritier potentiel au trône, à cause de la stérilité du mariage de Louis XVI et Marie-Antoinette. Il grandit à Versailles, à l’ombre d’un père frivole, beau et séducteur, infidèle à sa femme. Bientôt un cadet rejoint Angoulême, le duc de Berry. Angoulême rétrograde dans l’ordre de succession à la naissance des fils de Louis XVI et a une enfance sans histoire. Il n’est pas beau mais on lui trouve bon caractère. Sa vie bascule au moment de la Révolution. Son père Artois émigre dès juillet 1789, emmenant ses fils avec lui. Commence une errance qui s’achèvera en 1814.

 

Dauphin malgré lui

Très pieux, le jeune homme rejette la Révolution et souhaite se battre auprès de l’armée de Condé où il participe à des escarmouches. On a d’autres projets pour lui, comme le raconte avec talent François de Coustin : le marier à Marie-Thérèse, la dernière fille de Louis XVI, l’orpheline du temple. Louis-Antoine obéit à son oncle, Louis XVIII et épouse sa cousine dont il est très épris. Le drame de sa vie est ne pas devenir père d’un héritier : Marie-Thérèse n’aura que quelques fausses couches.

Contrairement à son frère (et à son père dans sa jeunesse), le duc d’Angoulême fréquentera peu les femmes… Par contre, il devient le neveu préféré de son oncle qui discerne dans le jeune homme des qualités précieuses dans une famille où l’esprit « ultra » domine… En 1814, Angoulême accompagne l’armée anglaise et rencontre l’Histoire à Bordeaux, où la population lui réserve un triomphe. Et bientôt Louis XVIII monte sur le trône laissé vacant par Napoléon…

 

Une vie inachevée

La période de la Restauration dessine la figure d’un prince plein de potentiel, d’un caractère qui le pousse à épouser des positions modérées, cependant soumis par contre aux influences de son entourage : en 1815, il laisse les ultras du sud-ouest imposer la Terreur blanche. Les années suivantes le voient devenir pourtant le meilleur élève de son oncle Louis XVIII, bien meilleur politique qu’on ne croit. L’assassinat de son frère Berry rebat malheureusement les cartes en faveur des ultras royalistes. Angoulême part ensuite se couvrir de gloire en Espagne dans une expédition visant à rétablir Ferdinand dans ses prérogatives, au grand dam de ses opinions « libérales ».

Son père devient Roi en 1824, multiplie les erreurs et… son fils ne dit rien. Angoulême se montre un fils obéissant, jusqu’à l’abnégation. Jusqu’à en oublier ses inclinations libérales. De toute façon, son père n’en a que pour son petit-fils, le futur comte de Chambord. On discerne chez lui un drame profond, celui de ne pas être reconnu par ce père qu’il idolâtre. En fait, Angoulême aurait gagné à être plus rebelle : il en serait devenu Roi de France, lui qui resta toute sa vie juste un fils… Excellente biographie en tout cas.

 

 

Sylvain Bonnet

 

François de Coustin, Louis XIX Duc d’Angoulême, Perrin, octobre 2017, 480 pages, 25 euros

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