Lynyrd Skynyrd, la légende du southern rock

« Ain’t no good life, not the one that I lead. »

 

Lynyrd Skynyrd, dans l’esprit de beaucoup, ce sont deux morceaux : Sweet Home Alabama au riff imparable (réponse à la chanson Alabama de Neil Young) et Freebird, fausse balade culminant en un jubilatoire barnum de soli de six cordes savamment entremêlés.  Lynyrd Skynyrd, c’est aussi — et surtout — LE groupe emblématique du southern rock, musique mélangeant avec habileté country, blues, bluegrass et hard-rock. Si le band n’est pas le géniteur du genre — on pensera plutôt à l’Allman Brothers Band — il en est en tout cas son ambassadeur le plus renommé, aux côtés de formations comme The Outlaws, Molly Hatchet, Blackfoot, Point Blank ou 38 Special.

Auteur d’albums studios remarquables (Nuthin’ Fancy, album gras et bluesy en diable, Street Survivors à la pochette hélas prophétique, bijou rock suintant la country et le blues par tous ses sillons) et d’un album live mythique (One More From The Road), Lynyrd Skynyrd a gagné le droit de figurer en bonne place dans toute playlist rock digne de ce nom. Lynyrd Skynyrd c’est surtout une légende forgée dans les excès (violence, alcool et drogue) et le drame, lorsque le groupe perd la moitié de ses membres lors du crash d’un avion les transportant vers Bâton-Rouge.

Lynyrd Skynyrd aura cependant survécu au pire pour continuer à exister sous la forme quelque peu originale d’un conglomérat du rock sudiste de l’époque, agrégé autour des survivants de l’accident. On retrouve, entre autres, en son sein, Johnny Van Zant (ex. The Austin Nickels Band) au chant, frère cadet de Ronnie chanteur originel de l’orchestre, ou encore Ricky Medlocke, ex-leader de Blackfoot (groupe au rock assez velu à découvrir urgemment) à la guitare lead.

 

 

« The smell of death surrounds you »

C’est par ce jour fatidique de 1976 que commence le très bon ouvrage de Bertrand Bouard, journaliste à Rock & Folk. Bonne idée s’il en est, puisque cela permet à l’auteur de nous ramener promptement aux origines du groupe en nous plongeant dans l’adolescence puis l’ascension de ses membres dans la morne et parfois hostile banlieue de Jacksonville en Floride.
En choisissant de coller au plus près des membres de Skynyrd, Bouard créé une proximité avec eux, permettant ainsi au lecteur de se faire le cuir au caractère abrasif de Ronnie Van Zant, vocaliste, et de s’émerveiller des prouesses de Duane Allman à la slide-guitar au côté des redoutables guitaristes que deviendront Allen Collins et Gary Rossington.
Comme dans un roman, nous suivons au plus près le — dur — apprentissage de la vie de groupe et la découverte éblouissante de la British Invasion (Beatles, Kinks, The Who…) qui a ouvert les écoutilles de toute une génération de turbulents branleurs, les poussant à leur tour à construire un pan nouveau — et plus dur — du rock américain.

 

une partie du Lynyrd Skynyrd en 1977

 

« Bullshit aside, take it easy no drama man »

Difficile de poser ce livre tant la lecture en est prenante et fluide par la grâce d’une écriture à la redoutable simplicité. Mais pour qu’une biographie soit solide, il faut d’autres qualités. Soyons rassurés, ce livre est abondamment sourcé, parsemé d’anecdotes parfois connues qui, remises en contexte, prennent une dimension plus humaine et mettent en perspective le destin d’un groupe hors normes. Tout juste peut-on regretter que l’iconographie ne soit plus fournie ; on sait la photographie rock souvent au service du talent des musiciens — quand elle ne le magnifie pas — on aurait donc aimé au moins voir des clichés des performances live où le groupe excellait souvent.
Quoiqu’il en soit, voilà un ouvrage à lire absolument pour le béotien en la matière, le spécialiste éclairé ou le farouche admirateur du groupe.

 

Eric Delzard

 

 

Bertrand Bouard, Lynyrd Skynyrd, Le Mot et le Reste, novembre 2017, 175 pages, 17 euros

 

 

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