« Moi, Charlemagne, empereur chrétien », le testament du père fondateur de l’Europe

Décédé en juillet 2017 à l’âge de 85 ans, Max Gallo s’est fait connaître du grand public par ses « romans-histoire » qui constituent l’essentiel de son œuvre. Agrégé d’Histoire mais aussi homme politique engagé dans la construction européenne, il était logique qu’il s’intéresse à celui qui est considéré comme l’un des pères fondateurs de l’Europe, ce sacré Charlemagne, empereur chrétien.

 

 

Le portrait d’un conquérant

Au crépuscule de sa vie, après quarante six années de règne, Charlemagne sent ses forces déclinées et décident de mettre ses affaires en ordre. Notamment il doit se préparer à se présenter devant Dieu et pour cela, ils confient les principaux actes de sa vie à un jeune lettré venu du monastère de Fulda, Eginhard. Il évoque tour à tour sa jeunesse, sa rivalité avec son frère Carloman, son amour pour les femmes et Dieu mais aussi les guerres qu’il a mené contre les Saxons ou encore les Lombards. On découvre ainsi le portrait d’un conquérant implacable, réformateur et bâtisseur, d’un amoureux des femmes, des arts et de lettres et surtout d’un homme seul face à ses décisions.

 

Dieu a voulu que je sois celui qui décide. J’étais l’empereur romain et chrétien »

Le père de l’Europe

Moi, Charlemagne, empereur chrétien arrive tardivement dans la bibliographie de Max Gallo quand on sait son engagement en faveur de l’Europe notamment auprès de Valérie Giscard d’Estaing. Comme ce dernier, il était un fervent défenseur de la mise en avant des origines chrétiennes de l’Europe. Vu comme le fondateur de la France, Charlemagne prend une toute autre dimension sous la plume de Max Gallo : il est le père de l’Europe. Le monde carolingien marque en effet un tournant : la volonté de conquête se structure, l’administration s’organise avec l’institution des comtés où les comtes dépendent directement du monarque. Peu cultivé, il s’entoure pourtant d’intellectuels qui vont le pousser à développer les études.

 

Le pape Léon III couronne Charlemagne Empereur

 

Rassembler le populus Christianus

Mais ce qui est remarquable, c’est la place que Dieu et l’Eglise tiennent dans la construction de l’empire. Ses conquêtes apparaissent comme la volonté de renforcer ce qui a été initié sous l’Empire romain : le lien entre le pouvoir et l’Eglise. Grâce à un maillage d’abbayes et de couvents, l’action des missi dominici, ses capitulaires ou encore la décapitation des quatre mille cinq cents saxons apostats à Verden en 782 montrent l’interaction forte entre l’Eglise représentée par le pape et Charlemagne. Le sacre de ce dernier apparaît alors comme la consécration d’une politique de trente ans pour prendre la première place dans l’ordre temporel face au l’empire byzantin et au pouvoir du pape.

 

L’écho lointain de nos origines, d’une histoire que rien ne peut effacer, sinon la disparition de notre civilisation. »

 

En faisant parler Charlemagne, Max Gallo montre un souverain plein d’ambiguïtés à la fois tendre et violent, paternaliste et implacable, un homme ambitieux et profondément croyant. Une œuvre de vulgarisation dont on peut louer l’écriture. Un petit bémol cependant : certaines affirmations sont sujettes à caution. Ainsi, il est très peu probable que l’impératrice byzantine Irène se soit rendue à Paderborn en 799. Moi, Charlemagne, empereur chrétien est cependant à lire pour ceux qui souhaitent revenir aux origines de l’Europe.

 

Clio Baudonivie

 

Max Gallo, Moi Charlemagne, empereur chrétien, Pocket, novembre 2017, 192 pages, 6,60 euros

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