Nelson Mandela

Hasardeux et difficile de faire une biographie en mode synthèse d’un tel personnage iconique que Nelson Mandela ! Pourtant, c’est ce que Fabrice d’Almeida a entrepris pour  l’immarcescible collection « Que-Sais-Je ? » aux vénérables Editions des Presses Universitaires de France – PUF. 

 

Nelson Mandela, un centenaire

Il y a 100 ans est né cette figure unique de l’Histoire de l’Afrique, que dis-je de l’Histoire mondiale. Celui que la postérité reconnaît comme un emblème de la lutte contre le racisme à travers son combat de 50 ans contre l’Apartheid sud-africain, et, par extension, contre toutes formes d’oppression de la différence, est-il réductible à un bilan autre que celui-là ?

Résistant à la tentation hagiographique, Fabrice d’Almeida nous dépeint sans fards celui qui fut aussi un homme d’état élu, au prise avec une réalité politique explosive et économique décevante. Un monde de rivalités où le tribu à la tribu crée aussi, au début de la libération du joug afrikaner, après sa libération et son élection au premier scrutin présidentiel libre (son slogan était un homme, un vote !), une forme de guerre civile entre communautés noires (surtout avec les zoulous, lui d’origine Xhosa).

 

Mandela is not mother Teresa

Car ne nous y trompons pas, comme il le rappelle justement par la foultitude de témoignages corroborés et d’entretiens personnels avec l’auteur, Madiba, surnom de Mandela, fut aussi confronté aux décisions dures et sombres de la guerre. La lutte armée aléatoire, la brutalité d’exécutions sommaires et aussi les tortures, toutes ces cruelles options sont validées par lui. Jusqu’à l’inéluctable : les coups de forces terroristes internes et externes entraînent des pertes collatérales forcément innocentes.

Même si « Mandela is not Mother Teresa » comme le dit son ennemi Zoulou Buthelezi, il est aussi un stratège patient, courageux et opportuniste. Parce qu’il a presque été brisé, il a su forgé un modèle à suivre pour l’ANC d’abord, puis pour l’utopie, improbable au départ, de la nation arc-en-ciel.

Certes, d’autres grandes figures prirent le relais pendant ses années de captivité (il fut le plus ancien prisonnier politique au monde devant les grands noms de l’ère soviétique comme Soljenitsyne). Monseigneur Desmond Tutu, prix Nobel de la paix 1984, le journaliste Biko, assassiné par la special Branch en représailles aux grandes émeutes de Soweto en 1977, Winnie Mandela sa seconde et peu contrôlable épouse, son ami Tambo puis son successeur Thabo Mbeki.

 

Une figure morale

Mais lui seul incarne cette figure morale unique, capable de sortir tout un pays d’un bourbier d’humiliations, de spoliations et de crimes. Un maelstrom qui ne semblait jamais prendre fin dans un cercle vicieux infernal de vengeances, de représailles et de terreur d’état, de communautarismes aussi.

Quelques soient les erreurs ou les fautes affrontées par toute une nation dans la commission vérité et réconciliation qui dura deux années et qui mit en prise bourreaux et victimes de tous les camps, les aveux et les repentirs, dont le clientélisme de clan est le plus anodin, la stature de Nelson Mandela résista, s’amenda, se renforça encore, au point de le transformer en héros fondateur d’une nation. Botha, puis De Klerk l’apprirent à leurs dépens.

Mandela est un modèle. Depuis Gandhi, le monde n’avait pas connu cela.

 

Mandela quel est ton nom

Intouchable à défaut d’être infaillible, Nelson Mandela eut plusieurs vies et plusieurs noms :

– à sa naissance, son nom d’ascendance royale Thembu : Rolhilhala a pour sens le secoueur de branches, l’agitateur ;

Madiba, son nom de tribu, a pour sens le réconcialiteur ;

Mais c’est sous celui de Dalibhunga qu’il sera finalement enterré, nom reçu lors de son initiation traditionnelle dont le sens, sibyllin, est  l’homme qui crée son peuple.

 

now, it’s free Nelson Mandela

 

Marc-Olivier Amblard

 

Fabrice d’Almeida, Nelson Mandela, PUF, « Que-sais-je ? » n°4130, 2018

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