La Saint-Barthélemy, massacre accompli au nom de Dieu

Couverture de La Saint-Barthélémy, les mystères d'un crime d'état À l’heure du retour du religieux dans notre société largement déchristianisée, face au totalitarisme islamique, il est bon de se replonger dans une des périodes les sombres de l’histoire de France, les guerres de religion, marquée par les massacres de la Saint-Barthélemy…

 

Une historienne du XVIe siècle

À côté de Jean-Marie Constant et de Denis Crouzet, Arlette Jouanna est une des meilleures spécialistes de la France de la Renaissance et des guerres de religion. On lui doit Le Devoir de Révolte (Fayard, 1989) qui se proposait d’analyser les comportements de rébellion de la noblesse française, Le Pouvoir absolu (Gallimard, 2009) et Le Prince absolu (Gallimard, 2014). Le présent essai sur La Saint-Barthélemy a été publié en 2007 dans la collection « Les journées qui firent la France » et est aujourd’hui repris en poche.

 

Qui est responsable de la Saint-Barthélemy ?

C’est l’énigme la plus fascinante du massacre de la Saint-Barthélemy depuis plus de cinq siècles : qui a commandité le massacre ? Une grande partie de l’historiographie a accusé l’Espagne d’avoir manipulé Charles IX et les Guise, afin d’empêcher l’expédition voulue par Coligny, chef des Huguenots, dans les Pays-Bas en révolte. Un autre courant stigmatise Charles IX et Catherine de Médicis, machiavéliens empreints de fanatisme catholique.

Pour Arlette Jouanna, la responsabilité de Charles IX est engagée dans la décision, prise vraisemblablement en son conseil, d’achever Coligny victime d’un attentat le 22 août 1572 : il craignait un complot ainsi que le comportement « indépendant » de l’amiral. À ce meurtre, on ajoute l’élimination de son entourage et des autres chefs du parti Huguenot, venu assister six jours plus tôt au mariage de Henri de Navarre et Marguerite de Valois. Mais il y a une seconde Saint-Barthélemy, celle du peuple catholique, qui éclate dans Paris puis dans certaines villes de province, que le Roi subit et ne peut arrêter.

 

Des conséquences du massacre

Si on suit l’analyse passionnante proposée par Arlette Jouanna, on peut voir dans la Saint-Barthélemy le moment où les protestants sont contraints d’admettre qu’ils ne rallieront jamais la majorité du pays à leur foi. C’est aussi une étape, à travers la politique de Charles IX, dans la construction d’une sphère politique dissociée de la sphère religieuse. Ce prince tant décrié a tenté selon elle de maintenir l’édit de 1570 qui garantissait liberté de conscience et de culte aux protestants. On parle alors de citoyen autant que de fidèle. Enfin, la Saint-Barthélemy, paradoxalement, constitue aussi une étape dans la construction de la monarchie absolue qui aboutira à l’avènement du charismatique Henri IV et à la sur-sacralisation de la personne royale, qui se révélera à même de garantir ce triomphe du politique. Voici donc une lecture revigorante et recommandée.

 

Sylvain Bonnet

 

Arlette Jouanna, La Saint-Barthélemy, Gallimard, « Folio Histoire », octobre 2017, 528 pages, 9,30 euros

 

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