Blanc autour, la révolte de Prudence Crandall

Wilfrid Lupano est un de ces conteurs d’histoires de la nouvelle génération prolifique, qui a à son actif des block buster de la BD. Blanc autour est l’occasion de s’associer à nouveau avec son vieux compère des bancs d’école anglaises Stéphane Fert. Ils reprennent avec talent dans Blanc autour un thème récurrent depuis de nombreuses années en bd, la ségrégation et la lutte des opprimés. 

Pas de places pour les blancs !

‘Scusez, mam’zelle. Ça m’a tombé des pognes, vot’ bazar. Il n’y a pas de mal cher monsieur. Ce n’est que de la boue. C’est moins salissant que votre conversation.

Nous sommes aux Etats-Unis en début du XIXe siècle, dans la ville de Canterbury au milieu du Connecticut. Dans cette province religieuse et sans histoires, la petite école est dirigée par Prudence Crandall. Tout parait être la ville la plus calme des USA jusqu’à ce que Prudence accepte une nouvelle écolière en son école. Ce qui va déclencher une tempête sans précédents.

Car la jeune Sarah est noire. Les gens de couleurs sont libres mais n’ont aucuns droits citoyens et certainement pas d’être instruits comme les Blancs.

Non seulement Prudence persiste à la garder mais en plus elle met dehors tous les enfants blancs pour se consacrer exclusivement aux enfants Noirs.

Les habitants si paisibles habituellement ont comme référence l’histoire récente de Nat Turner, un esclave noir qui s’est révolté en tuant des dizaines de Blancs. Prudence Crandall va alors subir l’opprobre de toute la population en un déferlement d’actions aussi inciviles qu’infâmes pour l’obliger à fermer son école.

Le témoignage d’une grande femme

Débuter l’année avec un roman graphique aussi sombre pourrait nous en écarter, ce serait une erreur. Le destin de cette directrice à fait couler beaucoup d’encre en son temps, jusqu’à en faire une bande dessinée pour la postérité, 180 ans plus tard. 

Si vous passez par Hartford, n’oubliez pas de visiter l’école et le musée consacrés à Prudence Crandall. Cette femme qui a donné sa vie pour convertir les mentalités et offrir une vraie place à cette civilisation qui parait toujours bien écartée de nos jours aux USA.

Est-ce peine perdu de faire évoluer les mentalités, là est peut-être le message des auteurs ?

L’auteur a su 

En tout cas le dessin est tout en délicatesse d’inspiration un peu cartoonesque voire caricatural. Il est nuancé de couleurs pastel pour rendre moins dramatiques les scènes et apporte de la légèreté dans la conception.

L’époque est bien ressentie, tant en termes d’habitations, de décors, de vêtements que de vie. Tout comme le langage qui, même s’il parait actuel donne un esprit suranné. La typo choisie renforce elle aussi cette notion. 

Xavier de la Verrie

Wilfrid Lupano (scénario), Stéphane Fert (dessin), Blanc autour, Dargaud, janvier 2021, 144 pages, 19,99 eur

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