L’effroyable tragédie, une nouvelle histoire de la campagne de Russie

Une spécialiste de la Russie

Ancienne élève de l’école normale supérieure, Marie-Pierre Rey est professeur d’histoire russe à Paris I Sorbonne. Elle s’est faite connaître en publiant une excellente biographe d’Alexandre Ier (Flammarion, 2009), implacable adversaire de Napoléon, et elle revint avec talent sur son séjour à Paris avec 1814 : un tsar à Paris (Flammarion, 2014). Les éditions Flammarion rééditent ici un ouvrage déjà paru en 2012 (c’est l’effet bicentenaire de la mort de Napoléon) qui revient sur la campagne de Russie, L’Effroyable tragédie.

Un affrontement longtemps différé

En fait, le malentendu régnait dès l’origine entre les empires français et russes, entre Napoléon et Alexandre Ier. Tilsit ne fut qu’une alliance en trompe l’œil. La grande explication vint avec l’invasion de 1812 mais rien ne se déroula comme prévu. L’armée russe refusa de livrer bataille, pratiqua la politique de la terre brûlée. Napoléon usa ses forces dans de longues marches étirant ses lignes de communication dans un pays qui lui était hostile. Après un succès difficilement remporté à la Moskova, Napoléon prend Moscou et… attend. Double erreur car d’une part Alexandre refuse de négocier et d’autre part plus Napoléon attend, plus il s’expose à l’arrivée de l’hiver.

La grande défaite

Ce n’est pourtant pas l’hiver qui a abattu Napoléon. Il a commis une erreur stratégique en s’enfonçant dans un pays méconnu (il avait pourtant lu l’histoire de Charles XII de Voltaire) et n’a pas défini clairement son but politique : battre Alexandre Ier oui mais pourquoi faire ? Pour le ramener à l’alliance de 1807 ? À Moscou, Napoléon perd son temps, il entame sa retraite trop tardivement, perd ses hommes dans les affres du froid. Lorsqu’il repasse le Niémen en décembre, il est battu pour la première fois (malgré la victoire de la Bérézina où il a évité la capture). La Russie, elle, est épuisée. Le pays a été ravagé par l’invasion.

Comme le démontre Marie-Pierre Rey dans L’Effroyable tragédie, Alexandre n’en est que plus déterminé à lutter jusqu’à la victoire contre Napoléon. Excellent ouvrage.  

Sylvain Bonnet

Marie-Pierre Rey, L’Effroyable tragédie, Flammarion « champ », avril 2021, 400 pages, 12 eur

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