Les Marins du Roi-Soleil, la politique navale au Grand Siècle

Comment la France de l’Ancien Régime s’est-elle dotée d’une Marine importante au point de devenir une rivale de la Navy anglaise ? Pour répondre à cette question, Michel Vergé-Franceschi, professeur émérite et auteur d’une récente biographie de Surcouf (Passés composés, 2022), s’est associé à deux autres spécialistes de la Marine moderne, André Zysberg et Marie-Christine Varachaud. Leur synthèse, Les Marins du Roi-Soleil, fera, je dois le dire, date.

Une France à la vocation maritime tardive

Contrairement à l’Angleterre, la France de l’époque moderne est venue plus tardivement vers la mer et la constitution d’une marine importante. C’est Richelieu qui lance le mouvement, à la fois pour faciliter le commerce et les débuts timides de la colonisation du Canada et surtout pour faire contrepoids à la puissance espagnole. Si la période de la Fronde voit cette entreprise s’interrompre, Colbert reprend le flambeau après l’élimination de Fouquet. Il fait construire des arsenaux et surtout des navires. Colbert va aussi s’atteler à la création du « Grand corps » des officiers de marine, s’attachant à leur formation intellectuelle et physique. Si l’Espagne a été battue, il faut maintenant faire face aux Provinces-Unies et, bientôt à l’Angleterre…

La Marine, une réussite de Louis XIV

Au fond, Colbert a réussi son pari et à faire de la France une puissance maritime qui compte. Avec des commandants d’escadre comme Abraham Duquesne (protestant, cela finira par poser problème) et Tourville, la marine française bat le hollandais Ruyter, domine la méditerranée dans la décennie 1680 et bombarde à plusieurs reprises des ports comme Alger. Le système des classes force à l’engagement dans la marine du Roi les matelots des littoraux, sans révolte majeure de leur part. La révocation de l’édit de Nantes voit bien quelques officiers choisir d’émigrer mais la plupart préfère se convertir et rester dans la Royale. Si l’Angleterre s’impose avec la Navy et interdit tout débarquement français et jacobite sur ses côtes, rien n’est encore joué à la mort de Louis XIV à l’orée d’un conflit que beaucoup d’historiens vont appeler la nouvelle guerre de cent ans (1715-1815).

Cette synthèse, qui raconte aussi les conditions de vie (difficiles, l’hygiène n’est pas une priorité) à bord des navires de la Royale, est une vraie réussite et facilitera la vie de bien des étudiants en histoire militaire, côté mer.

Sylvain Bonnet

Michel Vergé-Franceschi & André Zysberg & Marie-Christine Varachaud, Les Marins du Roi-Soleil, Perrin, avril 2023, 368 pages, 24 euros

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