Pour une érotique du sensible d’Aurore Vincenti

De la linguistique à la sexologie

Aurore Vincenti fut d’abord linguiste, elle a collaboré au dictionnaire Le Robert en tant que lexicologue. Aujourd’hui elle se présente ainsi : « Je suis linguiste du corps ainsi que chercheuse et éducatrice somatique en sexologie ». Elle anime des groupes de parole sur la sexualité, le corps, l’intime. Elle rencontre deux types de public : avant tout des personnes qui ont vécu des violences sexuelles, mais aussi des personnes qui déclarent avoir une sexualité libérée… qui souffrent de divers symptômes somatiques qui les empêchent de jouir pleinement…

Son accompagnement des personnes vise à leur faire retrouver une sécurité d’abord corporelle. Ce qui pose le problème suivant : dans notre imaginaire (socialement régulé !) le désir, la jouissance doivent être tous feux toutes flammes ! Et seraient donc indissociable d’une intensité, d’une violence. Dans un premier temps, il s’agirait de reconstruire une limite corporelle, celle qui a été transgressée, dans un second temps, une fois une sécurité restaurée, de faire de cette enveloppe une membrane de perception et d’échange.  

Le désir comme élan vital

Elle décrit le désir comme une « dimension sensorielle et sensible » qui apporte du plaisir. Autrement dit : éprouver les sensations, toutes les sensations, non seulement les sexuelles, apportent du plaisir… et du plaisir au désir… d’où le titre de son ouvrage. Pour Aurore Vincenti, le désir ne se cantonne pas au domaine sexuel :

« Il fait figure de moteur, d’élan vital dans tous les domaines d’une vie qui nourrit en retour le désir dans la sexualité ».

Elle éclaire heureusement la notion de consentement, si débattue : consentir signifie accepter, mas pas vouloir, ni désirer : « on peut tout à fait consentir à quelque chose qu’on ne souhaite pas » … mais à quoi on se résigne dans un rapport de domination ?  

Voici quelques-unes des idées force que l’on pourra retrouver dans ce livre. À retrouver perdues dans de longues considérations. Les notions développées sont parfois noyées dans une moralité convenue, elles participent trop souvent d’un « savoir mou » typique des ouvrages de développement personnel. C’est dommage.

Mathias Lair

Aurore Vincenti, Pour une érotique du sensible, La Découverte, octobre 2025, 240 pages, 20 euros

Laisser un commentaire