Amazone d’Outre-monde, la poésie de Parme Ceriset

Dès l’enfance, les poumons de Parme Ceriset se détruisaient lentement suite à une maladie rare. Après avoir passé quatre ans sous oxygène, elle été sauvée par une greffe des poumons. Le taux de survie est habituellement de 50% au bout de dix ans : Parme Ceriset été greffée il y a dix-sept ans. C’est dire quelle est dure à vivre !

Survivante

Survivante : la vie ne lui a pas été donnée, elle a dû la reconquérir de haute lutte. De ce fait, une vie simple ne lui suffit pas : elle veut sur-vivre, plus haut, la « vraie vie », celle que l’on pense ne pas pouvoir connaître, pris que l’on est dans les contraintes et les banalités de l’ordinaire… Réduite à rien, la « vraie vie » n’est plus alors, au mieux, qu’une une misérable nostalgie… Autant dire qu’on mésuse alors du cadeau qu’on nous a fait en nous mettant au monde : nous trouvons cela normal, banalement normal. Pas Parme Ceriset ! Du coup nous comprenons son goût pour les intensités, alors que nous aurions pu trouver cette écriture trop excessive, d’aucuns diraient, un peu facilement :  hystérique.

L’odeur de la pourriture

s’imprègne dans mon sang

Dit-elle. Et encore :

Mes cicatrices au vent

luisent d’étoiles pelées

Malgré tout

« Il fait un temps de fin des temps », et on n’oublie pas l’avoir frôlé, cette fin ! Voilà donc notre poète condamnée à partir à la conquête de la vie, et pas qu’un peu ! Il suffit que passe un désir :

Enivrée de toi, assoiffée de ta fougue

Je saisis ton mât brûlant, bondis, te dévore,

Je me déhanche, délice, danse sur ton empire.

Je suis Penthésilée, reine des Amazones

Parme Ceriset sait la fin de l’histoire. Au moins dit-elle, elle aura « embrasé le chaos / d’une rage de vivre insolente ». Il n’empêche, elle aura relevé le gant et vaincu autant qu’elle le pouvait :

J’ai dans mes viscères la joie des indomptables

Je suis Vie

… avec la majuscule de la « vraie Vie » évoquée plus haut. Pour parvenir à cette joie, encore a-t-il fallu frôler la mort… alors que dans le quotidien d’une vie banale et sans histoire la mort reste une abstraction : alors, inconsciemment, on se croit immortel, et du coup on ne vit pas, pas vraiment. On connait ce paradoxe que Parme Ceriset nous rappelle avec brio. Pour vivre, il est donc impératif de se savoir, très concrètement, au bord de la mort qui vient !

Telle est la leçon de vie dont Parme Ceriset nous fait le présent dans sa poésie.

Après avoir connu des « publieurs » aux noms d’oiseau, de vent, ou d’étoile qui ne respectent pas le b-a-b-a de l’édition, la voilà chez Tarmac où, je le pense, elle sera mieux traitée. Être un poète correctement publié, comme être un véritable éditeur de poètes sont des aventures de haut vol !

Mathias Lair

Parme Ceriset, Amazone d’Outre-monde, préface de Jean Azarel, Tarmac, octobre 2025, 66 pages, 15 euros

Laisser un commentaire