« Clint », le maître expliqué par ses films

ClintClint Eastwood est une légende…. Quand on dit ça, on a pas dit grand-chose, c’est le genre de phrases passe-partout qui dispense le journaliste de toute analyse originale de l’œuvre d’un acteur/réalisateur de 87 ans. Le défi relevé par Richard Schickel est ici d’expliquer l’homme par ses films, entre autres.

 

 

Un critique devenu historien du cinéma

 Richard Schickel s’est fait un nom en écrivant pour Time, Life ou le Los Angeles Times. Il a publié des ouvrages sur Harold Lloyd (grand comique du cinéma muet), Elia Kazan, Spielberg, Griffith ou Cary Grant et a également tourné des documentaires. Il a déjà travaillé sur Eastwood en publiant une biographie, traduit par les Presses de la Cité et sorti en 1997. Schickel est malheureusement décédé après sorti ce livre en février 2017.

 

 

Clint : un panorama réussi

Chaque film joué et/ou réalisé par Clint Eastwood est ici présenté et analysé par  Richard Schickel. Sa connaissance de l’œuvre est appréciable. On se gausse en relisant la notice consacrée à L’inspecteur Harry de (re)découvrir le jugement de Pauline Kael, grande prêtresse de la critique américaine dans les années 70 et 80 : « un film fasciste ». Pour être franc, on se bidonne rétrospectivement. Le public en tout cas y a plébiscité Eastwood en faisant de lui une superstar, ce qui lui a permis d’assouvir son ambition : devenir réalisateur. Et la progression est spectaculaire. On ne compte plus les classiques d’Eastwood, très justement relevés par Schickel : Bronco Billy, Pale Rider, Impitoyable bien sûr, Sur la route de Madison, Million Dollar Baby, Lettres d’Iwo Jima et tant d’autres.

 

Clint Eastwood

 

Des limites qui ne sont pas préjudiciables

On aurait aimé des avis plus développés sur certains films. Breezy ou L’échange, par exemple, mériteraient d’être redécouverts. Je me permets aussi d’être un peu excédé par Schickel dans la notice consacrée à Impitoyable où il se permet de dénigrer John Ford au profit d’Eastwood. Or on ne peut comprendre le grand Clint que dans son rapport au cinéma classique. Lancé par Leone (un génie), son vrai mentor fut Don Siegel. Ce dernier lui a transmis l’art du cinéma classique, une mise en scène dite « invisible » où on tourne beaucoup, en artisan, alternant les sujets et s’ancrant dans le cinéma de genre. On ne peut comprendre Eastwood sans comprendre sa filiation avec John Ford, Howard Hawks, Anthony Mann, John Huston et bien sûr Don Siegel. Il s’agit ici d’une querelle de cinéphiles, qui n’enlève rien à la réussite du livre, servi par une iconographie impeccable.

Tout fan d’Eastwood se devra de lire cet ouvrage.

 

Sylvain Bonnet

 

Richard Schickel, Clint, traduit de l’anglais (États-Unis) par Alice Boucher et Cédric Perdereau, introduction de Clint Eastwood, Flammarion, octobre 2017, 304 pages, 24,90 euros

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