Dans la toile, thriller domestique oppressant

Fragilisée après avoir survécut à un attentat, Isabel Gros annonce à son psychiatre qu’elle arrête sa cure. Son mari, médecin, abandonne sa patientele parisienne pour un cabinet en province, sacrifice qu’il fait pour le bienêtre de sa femme. Il installe leur nouvelle maison à Plainfaing, en pleine forêt vosgienne. Mais le petit paradis de tranquillité ne va-t-il pas se transformer en enfer sitôt qu’Isabel est seule avec elle-même, c’est-à-dire le plus clair de son temps. Ainsi s’ouvre La Toile, thriller à l’angoissante pression concentrique de Vincent Hauuy.

Le centre de détention pour cinglées de Plainfaing vous accueille sur ses quinze hectares de terrain boisé. Un agréable chalet hanté vous permettra de profiter de votre névrose dans un écrin de verdure. Une fois parvenue au terme de votre folie furieuse, vous serez délicatement exécutée, transportée dans un confortable sac mortuaire puis disséquée dans la maison des voisins. Ne manquez pas cette occasion unique et originale de vous faire truicider. »

S’agit-il du délire d’une femme qu’on a placé à l’abri d’elle-même dans un monde plus serein que l’agitation parisienne, un monde qui pourrait même lui rappeler son enfance ? Un monde où elle doit pouvoir trouver l’apaisement et comprendre le sacrifice de ceux qui l’aiment ? Ou bien s’agit-il d’une machination très complexe et aux visées cachées, dont elle serait un pion central ? Quant au titre, évoque-t-il la toile dont Isabel Gros serait la prisonnière où celle dont elle serait le centre ? Où bien sont-ce ses souvenirs qui tissent le toile de son destin ? Et cette sœur si proche et lointaine, pourquoi apparaît-elle dans ses moments de stress ?

Dans l’intimité d’une pensée égarée

Alternant les pensées du personnage principal et la reconstitution du passé familiale au travers de son journal intime, Vincent Hauuy montre sa capacité à imposer une angoisse qui va crescendo chez son lecteur. C’est l’oppression qui finalement s’installe. Il montre aussi combien il peut se mettre à la place de son personnage féminin, avec naturel. Et il se révèle un maître du thriller psychologique domestique, où l’économie de moyen et le huis-clos intime sert de base à tous les possibles. Sont-ce des apparitions ou est-ce la folie qui personnage — avérée et assumée, pour ainsi dire — qui se met en action ?

Dans la toile est un roman prenant et dont on ne comprend que trop tard qu’il nous a pris à son jeu perfide et magistral.

Loïc Di Stefano

Vincent Hauuy, Dans la toile, Hugo thriller, 352 pages, mai 2019, 19,95 eur

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :