« Les sept mariages d’Edgar et Ludmilla » de Jean-Christophe Ruffin


Les sept mariages d’Edgar et Ludmilla… Le titre laisse un peu rêveur. Car si l’on compte bien, sept mariages, cela signifie six divorces. C’est beaucoup pour une seule vie. Nous sortons donc d’emblée de la réalité, pour entrer dans un conte. Par bonheur, l’auteur ne nous laisse pas hésiter, et précise en préambule : « Ne prenez pas tout cela trop au sérieux ». Précaution indispensable pour mieux profiter du bouquin. 

Voici donc l’histoire de deux êtres, l’un Français, l’autre Ukrainienne, qui deviennent, l’un, un homme d’affaires à la Bernard Tapie, couvert d’argent, puis de dettes, l’autre, une chanteuse d’opéra, diva modèle Callas, mais tendances Castafiore. Pendant la deuxième moitié du siècle dernier, ces deux là s’aiment et se déchirent avec la même force, n’arrivant pas à vivre ensemble, mais pas non plus séparément. 

D’où des hauts et des bas tremblants dans le ménage, des portes qui claquent, des fleurs et des pleurs jamais loin les unes des autres. On passe en effet très vite des plus grands palaces d’Amérique aux pensions de famille de sous-préfecture, et des aventures rocambolesques nourrissent un récit distrayant, peuplé de créatures diverses, escrocs de haut vol, amies fidèles, banquier redoutable. Mais à l’arrivée, le personnage principal, c’est l’amour. 

Jean-Christophe Ruffin a dû bien s’amuser à raconter la vie de ces deux énergumènes, mélangeant à plaisir l’invraisemblable et l’eau de rose, quitte à effleurer le mélo où Margot va pleurer : l’amour toujours, un homme une femme, chabadabada, et tout çà….

Est-ce bien raisonnable de la part d’une des plumes les plus consacrées de la république des lettres ? Médecin, voyageur, romancier, historien, goncourtisé, gallimardisé, académicien, enfin ! Honnêtement, les incartades de ces deux « héros », cela ne fait pas très sérieux de la part d’un homme qui marche vers Compostelle, et théorise l’Humanitaire. 

Mais justement : pourquoi ne pas essayer de s’amuser un peu ? Ce livre original n’apportera rien à la belle carrière de Ruffin, mais montrera une nouvelle facette de son talent. Et puisqu’il ne faut surtout pas le prendre au sérieux, ce livre constitue un excellent roman pour les vacances. 

Didier Ters

Jean-Christophe Ruffin, Les Sept mariages d’Edgar et Ludmilla, Gallimard, février 2019, 370 pages, 22 eur

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