La fontaine des âges, qui est prêt à devenir immortel?

Un auteur reconnu  

Qui connaissait Nancy Kress en France au début des années 2000 ? Longtemps négligée de ce côté-ci de l’Atlantique, elle a remporté en tout cas le prix Hugo du court roman en  2007 pour Le Nexus du docteur Erdmann (Le Bélial, 2016) et le prix Nebula en 2012 pour Après la chute (ActuSF, 2014). Elle aime axer ses récits sur la génétique et ses dérives, comme par exemple dans Les Hommes dénaturés (ActuSF, 2017) où sont menées des expériences interdites. Le Bélial vient de publier La Fontaine des âges, novella parue initialement en 2007 et qui a remporté elle aussi le Nebula (ce qui excite notre curiosité).  

Des amours pas si défuntes  

Vieillard extrêmement riche, Max Feder vit désormais dans un foyer pour retraités après avoir transmis sa société à son fils. Tout dérape lorsqu’un de ses petits-fils égare une bague. Ce n’est rien une bague sauf que c’est le dernier souvenir de Daria, le plus grand amour de Max :  

Daria n’était pas grecque, turque, ni arabe. Elle était iranienne. Si vous pensez que ça m’a facilité quoi que ce soit, vous délirez. Je suis retourné à Chypre après la fin de ma période de service et j’ai cherché, cherché. Là-bas, nul ne la connaissait, ne l’avait jamais vue, n’admettait même son existence. Aucun dossier : « détruit pendant la guerre. »  

Cela réveille bien des souvenirs et pousse Max à vouloir la revoir. Depuis leur jeunesse, Daria est devenue un enjeu médical. Après avoir eu des cancers, les cellules de son corps sont devenues quasi-immortelles ; grâce à elles, bien des êtres humains prolongent leur vie. Daria vit dans une station orbitale où Max se rend. Pour la revoir et devenir immortel à son tour ?    

Une novella percutante et sensible  

La Fontaine des âges pose bien des questions : jusqu’où peut-on aller pour devenir immortel ? Quel prix est-on prêt à payer pour cela ? Et puis l’amour aussi. Max Feder, vieil escroc, garde au fond de lui l’image idéalisée de Daria. Mais Daria fut-elle vraiment cet idéal ? L’idéal survivra-t-il aux retrouvailles ? La réponse n’est pas simple, comme la vie. Tout le talent de Nancy Kress est condensé dans cette histoire développée à partir d’une hypothèse scientifique (un peu farfelue mais bon) et écrite avec sensibilité.

La Fontaine des âges, preuve supplémentaire du talent de son auteur, est une vraie réussite.    

Sylvain Bonnet  

Nancy Kress, La Fontaine des âges, traduit de l’anglais par Erwan Perchoc, illustration de couverture d’Aurélien Police, Le bélial « une heure lumière », février 2020, 112 pages, 8,90 eur

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