Helstrid, odyssée glacée

Un pilier de la science-fiction française

Christian Léourier fait partie de ces auteurs inclassables qu’on ne peut rattacher à un courant ou un sous genre. Il a bénéficié très tôt du soutien de Gérard Klein qui a publié Les Montagnes du Soleil en 1972 et La Planète inquiète en 1979 dans sa collection Ailleurs et demain chez Robert Laffont, textes très ancrés dans la science-fiction mais non dénués de poésie. Il est surtout connu pour le cycle de Lanmeur dont le premier volume, Ti-Harnog, sortit chez J’ai lu en 1984. L’ensemble du cycle a été récemment réédité aux Editions Ad Astra entre 2011 et 2015 avec deux romans inédits. Il s’est fait également un nom dans la littérature jeunesse. Helstrid est un récit inédit que les éditions Le Bélial publient dans leur collection « Une heure lumière ».

Un boulot qui finit mal

Helstrid est un monde froid, balayé par des vents de 200 km/h et impropre à la vie humaine. Cependant, on y trouve des minerais en abondance qui sont exploités par la Compagnie. Ses employés ont signé un contrat synonyme d’un exil loin de la Terre et de leurs proches : à leur retour, ceux-ci seront vieux, voire morts. Vic est de ceux-là. Il est parti pour oublier la femme qui l’a quitté, Maï. Bien sûr, celle-ci l’obsède toujours. Cette fois-ci sa mission est simple, accompagner un convoi qui doit aller ravitailler un avant-poste très éloigné. Il n’a même pas à piloter, c’est l’IA qui s’en charge.

Le voyage commence. Vic s’ennuie un peu, pensant à Maï et à leur histoire, tandis qu’Anne-Marie l’horripile. Quand une épouvantable tempête s’installe et coupe les communications avec la base, il commence à s’inquiéter. La situation va s’aggraver, Anne-Marie tente de le rassurer : tout est sous contrôle. Mais l’IA est-elle vraiment à la hauteur ?

A peine avait-il déposé son heaume qu’une voix sirupeuse l’enveloppa : / — Bonjour Vic. Mon nom est Anne-Marie. Je me réjouis de ce voyage en ta compagnie, de même que les autres membres du convoi, Béatrice et Claudine. / Qui donc avait préconisé d’affubler les camions d’un prénom féminin et de l’organe qui allait avec ? Encore un délire de psy supposé soutenir le moral des troupes : au cas où une femme se serait installée aux commandes, Anne-Marie aurait prétendu s’appeler Anton ou Andri et s’adresserait à elle avec une voix de Baryton ! »


Un récit efficace

Court, bien construit, Helstrid séduit le lecteur. L’ambiance se tend progressivement au fur et à mesure que Vic comprend dans quelle mélasse il se trouve. Ce monde si hostile à la vie ne peut qu’engloutir des explorateurs qui ont quitté une planète usée par l’espèce humaine. Au fond, cette nature inhospitalière constitue un des personnages principaux de cette longue nouvelle. Helstrid est aussi une preuve supplémentaire du talent de Léourier, trop méconnu aujourd’hui.

Enfin, on salue la qualité de cette collection du Bélial, qui sort pépite sur pépite. Pourvu que le filon ne se tarisse pas !

Sylvain Bonnet

Christian Léourier, Helstrid, illustration d’Aurélien Police, Le Bélial, « Une heure lumière », février 2019, 130 pages, 8,90 eur

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