Constantinople 1453, la chute finale
On a connu le médiéviste Sylvain Gouguenheim avec un livre érudit et polémique, Aristote au mont Saint–Michel (Seuil, 2008) qui remettait en cause la thèse selon laquelle le savoir grec aurait été essentiellement transmis via l’Andalousie et la Sicile musulmanes. Il est aussi l’auteur d’une excellente biographie de Frédéric II (Perrin, 2015). Il publie ici un ouvrage de synthèse sur la prise de Constantinople en 1453 pour la collection « Champs de bataille » des éditions Perrin.
Un long processus
S’appuyant sur les recherches les plus récentes, Sylvain Gouguenheim commence par décrire le lent processus de la décomposition de l’empire byzantin, qui débute sans nul doute avec la prise de la ville par les Croisés en 1204. Cependant les grecs reconstituent progressivement un Etat et Constantinople est reprise par Michel Paléologue. Las, le XIVe siècle est une catastrophe pour l’Empire. Guerres de succession, licenciement de la flotte, guerres civiles, peste noire… Le Basileus n’est plus qu’un roitelet, régnant sur une ville qui n’est plus que l’ombre de ce qu’elle a été, sur quelques îles et les territoires de Morée… Tamerlan donne un répit à cet empire croupion en écrasant les Ottomans en 1402. Juste un répit. pour sauver leur trône, les Paléologues cherchent du secours en Occident en proposant la fusion des églises mais la résistance du clergé orthodoxe, le jeu trouble de Venise et Gênes sapent ces efforts.
Une bataille de cinquante–cinq jours
Le sultan Mehmed II assiège la ville avec l’appui de cent mille hommes ; en face, Constantin XI n’en a que 7000 : comment ont-ils tenu ? D’abord les longs murs, bâtis aux IVe, Ve et VIe siècles étaient encore redoutables. Les défenseurs se battent très bien. Mais Mehmed II a une artillerie imposante, des ressources en hommes inépuisables. Toutes les sources dépeignent des combats presque homériques (car les grecs médiévaux sont pétris de culture antique et connaissent leur Homère sur le bout des doigts). La ville tombe, l’empereur disparaît et cinquante mille personnes sont réduites en esclavage. Les Ottomans ont l’impression d’accomplir enfin la volonté du prophète en prenant La Ville (« Istanbul » en turc), les grecs en resteront traumatisés et certains essaieront même à l’issue de la Grande guerre de reprendre celle qui fut Constantinople : en vain.
Excellent récit de bataille.
Sylvain Bonnet
Sylvain Gouguenheim, Constantinople 1453, Perrin, mai 2024, 368 pages, 25 euros