Histoire des 16, pionnières de l’identité féminine

Une grande historienne

On ne compte plus les ouvrages sur la France de Vichy que nous devons à Michèle Cointet. Citons ici sa précieuse synthèse Vichy et le fascisme (complexe 1987), puis Vichy capitale (Perrin, 1998), enfin L’Eglise sous Vichy (Perrin 1998). Tous si précieux pour comprendre l’attitude des catholiques pendant l’occupation. Enfin, sa Nouvelle histoire de Vichy (Fayard, 2001), somme de 30 ans de travaux sur la période, a fait date. Michèle Cointet fait partie de ces historiens qui ont largement profité de la brèche ouverte par La France de Vichy de Robert Paxton (quitte à le corriger) et qui se sont attachés à étudier, analyser, décrypter ce que fut cette période « noire » de l’histoire de la France contemporaine. Elle change ici un peu de point de vue en s’attachant à l’histoire des seize femmes désignées comme parlementaires à l’assemblée consultative d’Alger.

 

Qui étaient-elles ?

Michèle Cointet se livre ici à des portraits de ces femmes qui ont représenté la France à un moment où le droit de suffrage ne leur était pas accordé. On trouve des « femmes de » comme Gilberte Brossolette où Andrée Defferre (qui divorcera de Gaston Deferre, maire de Marseille, pour épouser son cousin José, autre résistant et futur grand chirurgien). Il y a aussi des femmes engagées comme Lucie Aubrac ou Martine Desrumeaux, proches du Parti Communiste. Toutes avaient à cœur le sens du devoir, celui de porter haut la cause de la représentation féminine dans une République jusque-là machiste.

 

Le rôle déterminant de deux hommes

Michèle Cointet revient très bien sur le pourquoi du comment des réticences des élites de la troisième République à donner le droit de vote aux femmes. La peur de donner le pouvoir à une droite catholique et rétrograde fut très forte chez les radicaux, par exemple : les femmes, influencées par le curé, allaient forcément voter à droite. Deux hommes, par un mélange de calcul et de conviction, ont tranché dans les débats, face aux nombreuses objections des parlementaires présents : Charles de Gaulle, bien sûr, démocrate-chrétien dans l’âme, et Fernand Grenier, du parti communiste.

Notre époque est marquée par une surenchère de certains courants féministes visant à nier le rôle de certains hommes dans l’émancipation féminine : eh bien de Gaulle et Grenier doivent ici être salués.

 

Sylvain Bonnet

Michèle Cointet, Histoire des 16, Fayard, octobre 2017, 216 pages, 18 euros

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