Feel good de Thomas Gunzig
La vie d’Alice a été réglée dans son enfance par le « tout juste » d’une famille modeste qui tentait de joindre les deux bouts. Mais Thomas Gunzig va lui offrir, avec Feel good, la bénédiction du roman de tous les possibles !
Qu’ils aillent se faire foutre !
“Qu’ils aillent se faire foutre avec leurs articles”, s’était-elle dit. Elle n’avait aucune idée de ce que pouvaient être ces putains de clés du bonheur mais elle savait que manquer de fric c’était vraiment l’horreur. Que tant qu’à être perdu, solitaire, déprimé, tant qu’à e pas avoir de projet, à ne pas “parvenir à se réaliser”, tant qu’à se tromper sur les gens, tant qu’à ne pas avoir d’estime de soi, tant qu’à ne pas être créatif, tant qu’à savoir qu’à la fin c’est toujours la mort qui vous attend, autant que tout ça, ce soit avec du fric ! »
Feel good est l’histoire d’un rapt d’enfant qui tourne très bien, et d’un hold up couronné de succès ! Comme on le voit, le thème n’est pas banal. En scène, deux personnes : une jeune femme pleine d’allant et de talent, quoique peu regardante sur la morale, et un jeune homme aussi fauché qu’elle, avec qui elle s’associe pour le meilleur et pour le rire ! Car ce livre est amusant.
La précarité comme seul moteur
Tels sont Alice et Tom, héros malgré eux d’aventures inattendues, et parfois drôles, dans une société remarquablement décrite, où il est souvent difficile de se sortir du chômage, voire de la misère. Car être pauvre, ce n’est pas un loisir ! Mais cette envie d’y échapper coûte que coûte les conduit à bien des excès, sans qu’ils perdent leur pouvoir d’attraction auprès du lecteur.
En cela, Feel good est, sous ses faux être de roman léger, surtout un roman social, photographie d’une époque où le cynisme et l’égoïsme finissent par décourager les âmes les plus bienveillantes. Et l’auteur s’y montre un observateur attentif, ce qui donne du poids à ce livre bourré de détail savoureux sur notre façon de vivre. On appréciera particulièrement une description amusée et cinglante du petit monde littéraire, bienvenu en ces temps de distribution des prix….
Comment écrire un livre ? Comment séduire un éditeur ? Comment gagner un peu d’argent ? Comment survivre dans le lagon des requins ? Avec des réponses incongrues à d’excellentes questions, Thomas Gunzig emmène le lecteur en mettant les rieurs de son côté. Excellent moyen d’avoir du succès, ce qui en fait le troisième personnage, et non des moindres, de ce bon bouquin.
Didiers Ters
Thomas Gunzig, Feel good, Au Diable Vauvert, septembre 2019, 390 pages, 20 eur