Miles and me, l’homme derrière la musique
« Ne joue pas ce que tu connais, joue ce que tu ignores. »
Un génie toujours présent
On en finira jamais avec Miles Davis ! Le trompettiste de jazz de génie décédé en 1991 (la même année que Gainsbourg) a toujours des héritiers et une actualité. Le label Rhino vient de publier un disque posthume (et décevant), Rubberband. Journaliste et écrivain, Quincy Troupe a été l’auteur d’une biographie de Miles Davis, publiée à la fin des années 80, où ce dernier se dévoilait sans malice, au risque de décevoir certains admirateurs. Troupe a sorti en 2000 Miles & me, plus axé sur la relation qu’il avait établi avec l’auteur de Kind of blue, autant sur un plan personnel qu’artistique. Le Castor astral en publie ici la version poche.
Un homme difficile à approcher
Troupe commence à raconteur ses premières rencontres avec Miles Davis, ça ne manquait pas de sel. Car le trompettiste détestait qu’on vienne le voir après un concert pour un autographe ou quoique ce soit : il n’hésitait pas alors à insulter l’impétrant. Farouche, Davis pouvait se comporter comme un vrai salopard. Les raisons en sont multiples : timide, blessé dans sa jeunesse par le racisme des américains blancs, il se réfugiait dans un comportement agressif pour mieux se protéger et montrer aussi qu’il ne se laissait pas faire.
Troupe en fit les frais, en venant à detester un des hommes qu’il admirait le plus. Et il le rencontra pour une interview, n’hésitant pas à le rembarrer. Miles modifia alors son attitude et le prit en sympathie. Il se révèle alors ouvert, drôle même si ces changements d’humeur sont parfois violents…
Un artiste transformiste
La lecture de cet ouvrage constitue une bonne clef pour apprehender une oeuvre très riche. Miles Davis a plusieurs fois changé de cap dans sa carrière. Du jazz modal à la fusion avec le rock et le funk, du bebop à ses ultimes incursions dans le rap. Il s’est toujours constamment réinventé, ouvrant la voie à David Bowie ou Prince (avec lequel il espérait d’ailleurs enregistrer). Et ses solo…
Il laisse derrière lui de grands disques comme Kind of blue, Sketches of spain, Bitches brew ou On the corner, que Troupe donne envie de réécouter. Laissons le mot de la fin à Miles :
La véritable musique est le silence, les notes ne font qu’encadrer ce silence »
Chapeau l’artiste !
Sylvain Bonnet
Quincy Troupe, Miles & me, Le Castor astral, août 2019, 208 pages, 14 eur