Azincourt, une défaite magistrale mais pas décisive

Auteure d’une biographie de Jeanne d’Arc (Perrin, 2020), Valérie Toureille est professeure d’histoire du Moyen-âge à Cergy-Paris Université. Son livre sur la bataille d’Azincourt, paru chez Albin Michel en 2015, est ici réédité dans la collection poche « Tempus » de Perrin.

Encore une bataille perdue…

Valérie Toureille commence par faire le récit de cette bataille… qui n’aurait pas dû avoir lieu. Les Anglais d’Henri V sont épuisés par leur campagne qui ne leur a rien rapporté. Les Français décident d’attaquer, sûrs de leur supériorité en nombre, plein de leur orgueil aristocratique. Et se reproduit alors ce qui s’est passé à Crécy et à Poitiers : la chevalerie française est décimée par les archers anglais. Pire, il n’y a pas de commandement unifié côté français, Charles VI étant absent et de toute façon incapable de commander à cause de sa folie. Une grande partie de la noblesse française, des princes du Sang, est alors tuée. Le royaume perd alors une partie de son élite. La plus grande conséquence est politique : Henri V comprend que la division entre Armagnacs et Bourguignons lui offre une opportunité. Et il va consciencieusement se rapprocher du duc de Bourgogne tout en faisant la conquête de la Normandie. Le meurtre du duc par des hommes du dauphin Charles lui offre la chance d’épouser une de ses sœurs, Henri V est sur le point de réaliser le rêve d’Edouard III…

Naissance d’une conscience nationale

Pourtant Azincourt ne marque pas le triomphe anglais. Henri V meurt et laisse un enfant comme successeur, Henri VI. Charles VII règne au sud de la Loire et s’accroche. La résistance française s’organise, Jeanne d’Arc sauve Orléans et bientôt le roi est sacré. Et puis sur les terres contrôlées par l’Angleterre, en Normandie même, le peuple refuse la domination anglaise. Des révoltes éclatent. C’est le début d’une conscience nationale, encore fragile, et d’une identité française qui se construit en réaction à l’anglaise. Au fond, les deux nations naissent l’une contre l’autre pendant la guerre de cent ans. Si la défaite d’Azincourt a permis cela…

Bonne synthèse en tout cas.

Sylvain Bonnet

Valérie Toureille, Azincourt, histoire d’une étrange défaite, Perrin « Tempus », septembre 2025, 240 pages, 8,50 euros

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