La Troisième griffe de Dieu, le mariage réussi de la science-fiction et du polar
Un personnage et une œuvre originales
Voici donc la suite d’Émissaire des morts, où nous avions fait la connaissance de l’insupportable Andrea Cort, diplomate chargée de la résolution de conflits inter-espèces. C’est aussi en apparence une misanthrope complète qui a autrefois participé à un génocide. Émissaire des morts fut aussi l’occasion pour le lecteur francophone de faire la connaissance d’un auteur de talent, Adam-Troy Castro, peu connu chez nous. A la fin du roman, Cort est devenue une agente des IA et est devenue un enjeu dans la lutte qui les oppose à d’autres IA disons plutôt hostiles à l’humanité. Cort a aussi contracté une sorte d’union libre avec Skye et Oscin Porrinyard, un couple dont les personnalités ont fusionné. Et c’est parti pour La Troisième griffe de Dieu !
Piégée
Cort est devenue procureure extraordinaire du corps diplomatique de la confédération : belle promotion qui lui donne beaucoup de liberté. La voilà d’ailleurs invitée par la famille Bettelhine, des marchands d’armes puissants et riches, symbole de tout ce qu’elle déteste. Andrea Cort s’étonne d’ailleurs de cette invitation mais la curiosité la pousse à accepter.
« Bravo à Hans Bettelhine. Xana, le monde-siège de sa société, venait de battre le record de l’intervalle le plus court entre le moment de mon arrivée et le premier attentat contre moi. »
Dès son arrivée au port orbital, des Bocaïens, membres de l’espèce victime de la tentative de génocide auquel a participé Cort dans son enfance, tentent de l’assassiner. Elle s’en sort mais l’arme utilisée dénommée la troisième griffe de Dieu, d’origine extraterrestre et vieille de 15 000 ans, l’étonne pour le moins. Les Bettelhine l’assurent qu’ils vont enquêter. Mais les choses se compliquent lorsqu’elle se retrouve piégé dans un ascenseur orbital et qu’un chercheur Bocaïen est retrouvé mort. Cort va mener l’enquête, le temps presse avant que l’assassin ne frappe à nouveau.
Une suite enthousiasmante
La Troisième griffe de Dieu est une occasion de lecture assez enthousiasmante. Le critique paresseux aime souvent brocarder les deuxièmes volumes, souvent moins bons que les premiers. Ici, ce n’est pas le cas du tout, Adam-Troy Castro a un savoir-faire narratif qui lui permet d’éviter de se répéter (ou alors il prend une drogue spéciale). Il réussit ici à marier avec bonheur science-fiction et roman policier à la manière d’Agatha Christie. On en en apprend aussi beaucoup sur le passé du personnage et les enjeux de cet univers. La nouvelle Un coup de poignard, qui conclut le volume, permet d’approfondir un peu l’univers de Cort et aussi de présenter La nouvelle-Londres. Visuellement, c’est un plaisir. Nous attendons désormais La Guerre des marionnettes avec une impatience avivée par la réussite de La Troisième griffe de Dieu.
Sylvain Bonnet
Adam Troy-Castro, La Troisième griffe de Dieu, traduit de l’anglais par Benoit Domis, Albin Michel « Imaginaire », illustration de couverture de Manchu, juin 2021, 464 pages, 24,90 eur