Aventuriers, pèlerins, puritains: des mythes à déconstruire

En préambule, je tiens à avoir une pensée respectueuse pour Xavier Broglin, maître de conférence en histoire moderne qui m’initia à l’histoire coloniale américaine avec patience et talent. Agnès Delahaye, professeure d’histoire coloniale et de civilisation américaine à l’université Lumière Lyon 2, défriche également ce pan de l’histoire méconnu du grand public français, couvrant pourtant plus de cent-soixante-dix ans d’histoire, qui ne peut être réduit à un simple prélude de l’histoire des États-Unis. Feuilletons donc de Aventuriers, pèlerins, puritains qui vient de paraître chez Passés composés.

Une colonisation hésitante

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Tout le monde connait l’histoire de la fameuse Pocahontas grâce à Disney (ici, on préfère Le nouveau monde de Terence Malick, à l’époque où ce dernier savait encore réaliser des films) : derrière la légende se lit l’histoire d’un aventurier, John Smith, ex mercenaire, qui va s’évertuer à fonder une colonie de peuplement. Or c’est très difficile, les colons n’arrivent pas à s’acclimater, beaucoup meurent de faim… et ce sont les indiens qui les aident. C’est le grand paradoxe quand on connait la suite : sans les indiens, le peuplement anglais de l’Amérique du nord dans la baie de la Chesapeake aurait échoué. Ceux qui ont raconté ensuite les débuts de la colonisation ont « invisibilisé » les indiens et leur rôle crucial. Ceux-ci ont ensuite été décimés par les maladies, libérant ainsi bien des terres…

Des puritains et des autres

Dans ces premiers colons, on trouve donc autant d’aventuriers que de puritains, ceux-ci se concentrant en Nouvelle-Angleterre, envoyés par la compagnie de la baie du Massachusetts. Notons le rôle crucial de ces compagnies, ce qui démontre d’ailleurs le manque de contrôle de ces colonies par Londres, qui reprendra la main plus tard dans la seconde moitié du dix-septième siècle, jamais complètement d’ailleurs. Ces puritains, « ancêtres » revendiqués dans la mythologie des États-Unis, ont leur vision de leur propre liberté et vont s’évertuer à combattre et à refouler les indiens (tout en prenant certains à leur service). C’est un véritable travail de déconstruction des mythes fondateurs de l’Amérique auquel s’est livré Agnès Delahaye. C’est très réussi.

Sylvain Bonnet

Agnès Delahaye, Aventuriers, pèlerins, puritains, Passés composés, octobre 2024, 272 pages, 20 euros

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