L’intrigant, nouvelles révélations sur Louis XVI

Une historienne de l’imagerie royale

Aurore Chéry est docteure en histoire moderne, chercheure associée au LAHRA (Laboratoire de recherche historique Rhône Alpes). Sa thèse portait sur L’Image de Louis XV et Louis XVI, entre tradition et création (2015) et ses travaux ont trait à l’écriture du roman national et les usages publics de l’Histoire. Elle a aussi co-écrit Les Historiens de garde (Libertalia, 2016). En septembre 2020, elle a publié L’Intriguant, une biographie de Louis XVI dont elle propose un portrait, on va le voir, iconoclaste.  

Un révolutionnaire ?

Résumons la thèse de ce livre : Louis XVI aurait non seulement été un roi révolutionnaire mais aurait déclenché la Révolution, prenant ainsi le contre-pied de toute l’historiographie le concernant depuis près de deux siècles. Pour ce faire, il se serait appuyé sur des réseaux protestants, reprenant ainsi une politique qui avait été celle de son aïeul Henri IV en s’écartant de la politique de l’alliance autrichienne initiée par Louis XV, qui lui a imposé un mariage avec une archiduchesse. Or, Louis XVI, selon Aurore Chéry, se méfie de sa femme en laquelle il voit un agent d’influence de l’Autriche catholique des Habsbourg et l’emblème d’un parti à la cour qu’il combat. Last but not least, notre brave roi aurait eu des maîtresses dont une, Françoise Boze, aurait joué un rôle politique majeur.  

Une méthode et des résultats contestables

Louis XVI n’était assurément pas le benêt longtemps dépeint par beaucoup d’auteurs. Intelligent, il a mené une guerre victorieuse contre l’Angleterre (soulignons le rôle de Vergennes, son ministre des affaires extérieures) qui a lavé le déshonneur de la défaite subie lors de la guerre de sept ans. Et il est avéré qu’une partie de sa politique était potentiellement révolutionnaire : songeons aux projets fiscaux de Calonne lors de la convocation de l’assemblée des notables en 1787.

Aurore Chéry va beaucoup plus loin en le peignant comme un génie de l’intrigue, pour paraphraser le titre, ayant comme volonté d’instaurer une république universelle, indépendante de la papauté. Elle voit dans sa politique une volonté de renouer avec celle d’Henri IV en s’appuyant sur les protestants. Pour ce faire, elle relit les sources à la recherche d’éléments pouvant prouver sa thèse, quitte à les tordre un peu. Il est vrai que la période est complexe, pleine de complots et d’intrigues dues à des factions implantées à la cour et à Paris. Mais le portrait, à la limite de la fantaisie, de ce génie de l’intrigue qui, au final, échoue puisqu’il finit sur l’échafaud, ne convainc pas.  

Sylvain Bonnet

Aurore Chéry, L’Intrigant, Flammarion, septembre 2020, 602 pages, 25 eur

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