« Blue Giant », tome 3 : countdown

La relation entre un maître et un disciple est le cœur de toute évolution vers le meilleur. Et Blue Giant en est la parfaite illustration. Le troisième tome, tout en continuant de montrer l’évolution de Myamoto Dai, se positionne comme un moment charnière :

 

Le maître et le disciple

Ancien élève du prestigieux Berklee College of Music, Yui est maintenant professeur de musique et compose pour des publicités. Rien de prestigieux. Son ancien camarade le retrouve à l’occasion d’un petit concert local, et la nostalgie vient éclairer le présent médiocre. Aucun n’est devenu un vrai grand du jazz. Mais Yui a encore un espoir, celui de transmettre à Dai et se réaliser à travers lui.

 

 

De son côté, à force d’un travail acharné d’au moins trois heures par jour depuis trois ans (quelle que soit la météo, sous la pluie ou dans le froid glacial qui lui colle les lèvres à l’anche), Dai est devenu un vrai très bon saxophoniste. Il enchaîne les gammes avec brio et parvient à émerveiller, seul en scène, un auditoire qui attendait plutôt un groupe de rock, en jouant du John Coltrane ! Autre moment clé, après son solo, il joue accompagné de son professeur de musique du lycée, Madame Kuroki, qui surprend tout le monde elle aussi. L’évolution du jeu en groupe (écouter l’autre, garder le tempo, etc.) se confond ainsi avec la reconnaissance de la transmission du savoir, en ce sens Dai est un garçon parfaitement ancré dans les normes et prouve qu’on peut être traditionaliste dans le respect et totalement free dans son art propre.

 

Dai et sa nouvelle coupe, en hommage à Sonny Rollins, un des premiers musiciens à avoir une crête (dans les années cinquante, bien avant les punks…)

 

Aux portes du Club

Dai est devenu suffisamment bon instrumentiste pour continuer d’exprimer sa puissance créatrice tout en suivant les règles. Ce n’est plus le libre déchaînement de son souffle débridé, limité seulement par sa capacité technique et pulmonaire. Il est vraiment aux portes de son propre génie. Le professeur Yui tente une deuxième fois de présenter son disciple Dai au club de jazz d’où il s’était fait sortir au premier tome. Convaincra-t-il cette fois ? Il faut comprendre à quel point un club de jazz est un lieu important, sacré, dans l’évolution d’un musicien. C’est le passage obligé pour intégrer la communauté, être reconnu par ses pairs, mais c’est surtout le temple éternel du jazz, aussi petit soit-il, bien plus que tous les stades à remplir.

 

 

Loïc Di Stefano

 

Shinichi Ishizuka, Blue Giant, tome 3, Glénat, septembre 2018, 208 pages, 7,60 eur

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