Ferdinand Ier de Bulgarie, un prince entre la tradition et la modernité

Une chercheuse face à son sujet

Docteur en histoire, Charlotte Nicollet s’est installée en Croatie et est devenue consule honoraire à Split. Elle publie cette année au CNRS sa thèse adaptée en biographie et consacrée à un souverain méconnu, Ferdinand Ier de Bulgarie. Petit-fils de Louis-Philippe par sa mère Clémentine, Ferdinand est une figure princière plutôt originale, on va le voir, et il a dû faire face à des choix particulièrement difficiles dans une période qui ne l’était pas moins.

Un prince à la recherche d’un trône

Et nous voici donc plongé dans la vie de Ferdinand, membre de la famille des Saxe-Cobourg avant tout. Les Cobourg sont une famille alliée à tous les plus grands trônes d’Europe (dont l’Angleterre) et on fait au XIXe siècle souvent appel à eux pour siéger à la tête de pays européens récemment indépendants. La Bulgarie, récemment libérée des Ottomans (quoique) a à sa tête le prince Alexandre de Battenberg (l’Allemagne est une pépinière de princes désœuvrés) mais la greffe n’a pas pris et il faut un remplaçant. Ce sera donc Ferdinand. Il restera cependant catholique dans un pays orthodoxe, tout en faisant baptiser son fils et successeur Boris dans la religion de ses sujets… au grand dam de sa femme et de Vienne. L’important est ici de fonder une dynastie.

Un prince adepte de l’équilibrisme

Voici donc un prince à la tête d’un état « neuf » et qui identifie ses intérêts à ceux de sa patrie d’adoption. Il aura à cœur de moderniser la Bulgarie, tant économiquement que politiquement, tout en enracinant un régime parlementaire encore balbutiant. Dans l’échiquier balkanique, Ferdinand, si on suit Charlotte Nicollet, se rallie au pragmatisme diplomatique. Il réussit à arracher une indépendance complète à Istanbul, forge un instrument militaire qui brille lors de la conquête de la Macédoine et d’Andrinople lors de la première guerre balkanique… mais perd une large partie de ses gains lors de la deuxième guerre balkanique face à la Serbie et la Grèce. Une catastrophe qu’il essaie de réparer en lançant son pays en 1915, après avoir joué de sa neutralité, dans la grande guerre aux côtés des empires centraux. Un échec encore plus grave au final même s’il réussit à sauver sa dynastie. Il finit par laisser son trône à son fils Boris et part en exil en Bavière.

Ferdinand a quelque chose de tragique, piégé entre la tradition et la modernité, et cette biographie lui rend justice.  

Sylvain Bonnet

Charlotte Nicollet, Ferdinand Ier de Bulgarie, CNRS éditions, juin 2021, 350 pages, 25 eur

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