Collapsus, cauchemar écologiste
Du journalisme à la Série noire
Thomas Bronnec s’est d’abord fait connaître comme journaliste et auteur de documentaires avant de se lancer dans le polar. Il s’est fait un nom dans le thriller politique avec des romans comme Les initiés (Gallimard, 2015) ou En pays conquis (Gallimard, 2017) où il décrivait avec détails les compromissions entre les élites financières et les politiques avec un leitmotiv : rien ne doit changer, même dans le cas d’une arrivée des extrêmes au pouvoir. Avec Collapsus, il se livre, comme on va le voir, à un nouvel exercice, le thriller d’anticipation politique.
L’écologie au pouvoir… pour le pire ?
Pierre Savidan n’a jamais aimé ce bureau, ni ce palais. Ni avant, ni après. Les tapisseries des Gobelins, le lustre Napoléon III avec ces cinquante-six lumière – c’est ce qu’on dit, il ne les a jamais comptés -, l’impératrice Eugénie pour qui cette pièce a été décorée… Rien de cela ne lui parle. Il habitait un corps de ferme et le voici dans le palais d’un roi.
Trois ans auparavant, Pierre Savidan, candidat écologiste radical, a été élu face à une candidate d’extrême-droite. Il a depuis mis en place des réformes de plus en plus radicales : des programmes de rééducation des boomers, une loi pour réduire la consommation de viande, une autre pour limiter les transports aériens… Mais cela ne va pas assez vite. Savidan a des fans. Ceux-ci pénètrent un jour dans une maternité où vient d’accoucher Anaïs Fleurance. Paniquée, celle-ci tombe avec son bébé de la fenêtre (l’a-t-on aidé ?). Son mari, Olivier Fleurance, est le propriétaire de la compagnie du lait, visé par Savidan. Le voici opposant résolu au président. Ce dernier, pour faire face à des manifestations contre sa politique, après quelques violences, décide d’avoir recours à l’article 16 de la constitution. Et les dérapages commencent… Pour sauver la planète, jusqu’où est-on prêt à aller ?
Un roman de notre temps
Collapsus est un thriller d’anticipation. Que se passerait-il si des écologistes radicaux, anti-viande, désireux de réduire à tout prix l’empreinte carbone de l’humanité, s’emparaient du pouvoir ? C’est un roman satirique aussi, un peu lourd parfois. Mais, quand on voit des militants du mouvement d’extinction rébellion balancer de la soupe sur des tableaux dans des musées, quand on voit de nombreux jeunes déclarer ne pas vouloir d’enfants pour ne pas nuire à la planète (thème abordé dans le roman dans un registre orwellien), Collapsus invite à réfléchir. Il ne s’agit pas de réduire les idées écologistes, à un moment où le réchauffement climatique devient un problème existentiel pour l’espèce humaine, à des propos extrémistes. Mais les dérives de certains inquiètent. En cela, le roman de Thomas Bronnec, pure anticipation, incite à rester vigilant.
Sylvain Bonnet
Thomas Bronnec, Collapsus, Gallimard « Série noire », septembre 2022, 480 pages, 20 euros