Dictionnaire amoureux du mauvais goût, cocasse et goguenard
Le mauvais goût, c’est très personnel
Dans la très réussie collection des dictionnaires amoureux des éditions Plon, voici Nicolas d’Estienne d’Orves, l’auteur à succès d’Othon ou l’aurore immobile (les belles lettres, 2002) et de La Gloire des maudits (Albin Michel, 2017), qui a choisi de consacrer un volume au mauvais goût. Drôle d’idée car comment définir au fond le mauvais goût ? Il varie selon les époques, les cultures et bien sur les modes… Nicolas d’Estienne d’Orves avoue d’emblée qu’il sera partial, qu’il sera au fond le résultat de sa personnalité culturelle, forgée sous les septennats de Giscard et Mitterrand : quelle meilleure formation pour nous décrire et faire savourer son mauvais goût ! ?
Un échantillonnage goûtu
De fait, on trouve de tout dans ce dictionnaire question entrées. Notre auteur flingue les fêtes de fin d’année (qui aime ça à part ces infâmes moutards avides de cadeaux ?), la Foire internationale d’art contemporain dite FIAC dont seuls les enfants, c’est vrai, ont au fond le droit de se moquer. Le pet, Laurent Gerra et Just Jaeckin, réalisateur d’un navet savoureux nommé Emmanuelle qui chauffa la France de Giscard, ont droit aussi à des petites notules savoureuses. La Vie sexuelle de Catherine M., best-seller du début des années 2000 totalement illisible a droit aussi à son démontage en règle (au fait, je suis d’accord, Julia Channel est incomparablement plus bandante que madame Millet, je ne vais pas me faire des amis mais tant pis).
Et le cinéma ?
On découvre aussi un Nicolas d’Estienne d’Orves cinéphile se marrant devant Le Fantôme de la liberté de Luis Buñuel avec sa scène où Michaël Lonsdale se fait fouetter (frappe vieille pute !), certainement pour oublier son amour pour Delphine Seyrig, et Femme fatale de Brian De Palma, redoutable nanar (dans une filmographie qui en compte pourtant pas mal). Terminons avec la notice sur Jean Yanne, acteur et humoriste génial, chanteur à l’occasion, réalisateur inégal dont on recommande à chaque mouvement de grève son Moi y en a vouloir des sous, qui connaissait bien le sujet du mauvais goût : il me manque.
Ce Dictionnaire amoureux du mauvais goût devrait être remboursé par la Sécurité sociale.
Sylvain Bonnet
Nicolas d’Estienne D’Orves, Dictionnaire amoureux du mauvais goût, Plon, janvier 2023, 608 pages, 26,50 euros