La France d’Éric Zemmour ou l’effondrement final – La France n’a pas dit son dernier mot

Les démons de la contre-culture

Ce qui frappe par ailleurs, dans ce nouveau document signé par le polémiste le plus brillant de sa génération, c’est qu’il ne se fait aucune illusion. On ne trouve sous sa plume aucune complaisance pour lui-même ou ses contemporains. Le passage sur Mick Jagger est particulièrement intéressant à cet égard.

Les Rolling Stones furent dans ma jeunesse le porte-drapeau d’une révolte juvénile contre les adultes et l’ordre établi. Ils sont devenus les puissances tutélaires du nouvel ordre mondial.

C’est aussi avec tristesse et contrition que l’on comprend que nous avons prêté le flanc, durant notre jeunesse, et sans le savoir, à ce qui représentait le plus décadent et la pente la plus glissante pour notre civilisation. Tout ce qui fut autrefois considéré comme une contre-culture, en brèche avec la morale de papa, est devenu depuis les années 90 la culture officielle, bien-pensante et politiquement correcte. Depuis les sixties, comme on dit, c’est la jeunesse qui donne le tempo ; elle est devenue une référence, à tel point, que les parents issus de cette génération née après 1970, écoutent religieusement leurs enfants, leur donne le droit de décider à leur place, les consultent sur tout et se soumettent à leurs caprices tyranniques et sans partage.

Mick Jagger est devenu durant le seconde moitié du XXe siècle, le référent culturel et moral de toute une génération, « pour le meilleur et pour le pire », écrit Zemmour.

Il avait incarné l’individualisme, l’hédonisme, les drogues, la fureur adolescente, la liberté sexuelle, une certaine androgynie, ce qu’on appelle aujourd’hui la fluidité des genres, l’hégémonie sans partage de la langue anglaise, le métissage culturel entre l’Afrique et l’Europe, sans oublier un solide sens des affaires qui tourne souvent à l’âpreté au gain et à la cupidité : la mondialisation des marchés, et même la chute du communisme […]. 

Le rock américain, son cinéma et sa culture niaise, sa démocratie linéaire et insipide, autant d’outils dont s’est servie la civilisation américaine pour nous contaminer, grâce à son redoutable et dangereux soft power, à ses codes les plus décadents, les plus irrationnels, ce qui a eu pour conséquences dramatiques et désastreuses de créer notre société nouvelle aux valeurs inversées.

un homme du livre

Zemmour est un homme du livre, c’est un intellectuel et un idéologue assumé (à l’inverse des autres journalistes dans les médias, plutôt de gauche, qui refusent de le reconnaître mais qui sont de dangereux activistes). C’est aussi un débatteur hors-pair, un homme qui sait à la fois prendre sur lui, et se remettre en cause. C’est parfois un homme qui doute et qui assume qu’il doute. C’est aussi un homme qui vient déranger le jeu, et qui définit désormais les questions de la campagne présidentielle à venir. C’est enfin, peut-être, la bonne personne, au bon moment et au bon endroit, pour sauver notre pays de l’effondrement général. C’est enfin un ami de la France, plutôt un patriote qu’un nationaliste, un libéral, plutôt qu’un totalitaire qui multiplie les déclarations contre son propre pays, comme on le constate un peu trop souvent dans les rangs de la gauche woke et indigéniste.

l’ultime combat pour la France

 Il termine son livre sur ces mots :

Nous sommes engagés dans un combat pour préserver la France telle que nous la connaissons, telle que nous l’avons connue. Ce combat nous dépasse tous et de lui dépend l’avenir de nos enfants et petits-enfants. Il concerne aussi ceux qui nous ont précédés, qui ont forgé la France dont nous avons hérité, la France si belle que nous aimons et que le monde entier admire, ces ancêtres à qui nous devons reconnaissance et respect, alors que nous ne cessons de les abreuver d’insultes et de reproches, ces ancêtres à qui nous devons de préserver la France telle qu’ils nous l’ont léguée. Nous sommes là pour perpétuer l’histoire de France. Pour ceux d’hier et ceux de demain, il ne s’agit plus de réformer la France, mais de la sauver. La France n’a pas dit son dernier mot.

Que dire, sinon que, dans ce moment où l’on vit le retour du tragique, nous sommes à la fin d’un cycle, et nous devons prendre date de ce moment qui nous somme de reconquérir notre liberté, ou bien d’assister impuissants à l’effondrement de nos valeurs, et au déclin de notre histoire. Jusqu’ici on croyait au progrès, maintenant, il s’agit surtout de penser à rebondir…

Marc Alpozzo

Éric Zemmour, La France n’a pas dit son dernier mot, Rubempré, septembre 2021, 352 pages, 21,90 eur

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[1] « En septembre 202, Xavier Bertand m’invite à déjeuner… (Il) évoque sans fard sa prochaine candidature à la présidentielle : “Je sais bien que je n’ai pas le niveau. Mais plus personne ne l’a aujourd’hui. La présidentielle, ce n’est pas un examen, c’est un concours. C’est le niveau des autres qui compte.” »

[2] Zemmour parle de la complexité de pensée de la bande à Charlie Hebdo.

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