Les lois Veil, un siècle d’histoire
2024 et 2025 sont l’occasion de fêter le cinquantième anniversaire des lois Veil car, rappelons-le, il y en eut deux : une sur la contraception qui approfondissait le cadre posé par la loi Neuwirth de 1967, et celle sur l’interruption volontaire de grossesse. La réédition en poche de cet ouvrage paru chez Armand Colin en 2012 et dû à la plume de trois historiennes -Bibia Pavard, Florence Rochefort et Michelle Zancarini-Fournel – permet de revenir sur la genèse de cette législation historique.
Une lente maturation

Et il faut dire que la préhistoire de ces lois fut complexe. Les églises ont ainsi eu constamment des préoccupations natalistes découlant de leurs conceptions de la famille. L’hécatombe de la première guerre mondiale a amené l’Etat républicain à légiférer en 1920 en prohibant l’avortement et en instaurant un cadre pénalisant les « avorteuses » tandis que se met en place une politique publique nataliste. La conséquence en est simple : les femmes ont moins que jamais le contrôle de leur corps et de leur fécondité, malgré la lutte de certaines militantes. Sous Vichy, une femme sera même condamnée à mort pour fait avorter une autre femme (Claude Chabrol en a tiré un très beau film). L’après-guerre ne change que peu la donne, communistes et gaullistes s’accordant ici sur ce qui semble l’essentiel. Le débat sur la contraception et l’accès à la pilule s’impose cependant peu à peu, ce qui aboutit à la loi de 1967. Rien sur l’avortement par contre jusqu’au procès de Bobigny.
Un droit aujourd’hui acquis ?
L’ouvrage retrace très bien comment le thème de la légalisation de l’avortement s’est imposé dans le débat public, comme Giscard (et Jacques Chirac) ont décidé d’aller de l’avant en nommant Simone Veil ministre de la santé. La personnalité de Veil, son parcours, sa maîtrise du débat ont grandement aidé à l’adoption de la loi mais il venait couronner un mouvement de fond, porté par bien des militantes féministes. Si aujourd’hui le droit à l’IVG est constitutionnalisé, ses opposants n’ont cependant pas désarmé et l’exemple américain vient rappeler que rien n’est jamais acquis.
Bonne synthèse.
Sylvain Bonnet
Bibia Pavard & Florence Rochefort & Michelle Zancarini-Fournel, Les lois Veil, La Découverte, mai 2024, 360 pages, 12 euros