La guerre franco-allemande de 1870, un traumatisme français

De nouveaux historiens  

Cet ouvrage vient après La Guerre de 1870 (Fayard, 1990) de François Roth (1936-2016), qui avait marqué le lectorat et surtout l’historiographie de ce conflit méconnu et pourtant fondateur de notre époque. Ses auteurs sont des spécialistes du XIXe siècle : Nicolas Bourguinat, professeur à l’université de Strasbourg est un spécialiste de l’histoire de l’Europe au XIXe siècle, on lui doit par exemple une Histoire des États-Unis de1865 à nos jours (Armand Colin, 2006) ; Gilles Vogt, jeune docteur en histoire, travaille quant à lui sur l’attitude des pays neutres face à la guerre franco-allemande. Quelle est ici l’originalité de leur démarche ?  

Un conflit aux résonances européennes  

Les auteurs, après être revenus sur les origines et le déroulement du conflit, insistent beaucoup sur son impact sur les autres pays européens : c’est là leur originalité. On voit ainsi que les opinions européennes se sont passionnées pour cette guerre. L’hostilité à Napoléon III a d’abord été générale avant qu’une prise de conscience des souffrances des populations civiles françaises, à Paris par exemple lors du siège, ne pousse à un changement radical. L’émotion l’emporte, la sympathie est générale en Belgique ou en Angleterre envers les français, ce qui déclenche des initiatives humanitaires de grande ampleur.

La fondation de l’Empire Allemand entraîne aussi un bouleversement géopolitique qui voit le centre de gravité du continent se déplacer de Paris à Berlin. En Grande-Bretagne, un Disraëli voit tout de suite le danger potentiel. En France, le choc est terrible. En 1814-1815, c’est l’Europe coalisée qui avait défait Napoléon. En 1870, ce sont la Prusse et ses alliés allemands…  

La mémoire d’une guerre  

Cette guerre sera un lieu de mémoire. François Roth avait déjà exploré cette dimension que nos deux auteurs étudient à leur tour. La perte de l’Alsace-Lorraine fut un traumatisme national aussi lourd que la défaite. Bien des écrivains ont, dans les années suivant le conflit, écrit des romans ou des nouvelles se déroulant durant le conflit : Alphonse Daudet, Guy de Maupassant (Boule de suif), Émile Zola (La Débâcle). Pour autant, les deux auteurs relativisent le poids de l’idée de Revanche dans l’opinion française. Reste que Bismarck, en suivant l’État-major prussien, a créé une situation entre les deux pays qui a empêché toute réconciliation jusqu’au déclenchement de la Grande Guerre.

Voici une très bonne synthèse sur un conflit dont, je le répète, nous sommes encore les enfants. Et dont la dimension européenne méritait d’être expliquée.        

Sylvain Bonnet  

Nicolas Bourguinat et Gilles Vogt, La Guerre franco-allemande de 1870 : une histoire globale, Flammarion « champs », août 2020, 512 pages, 15 eur

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