Tuer Jupiter, l’assassinat d’Emmanuel Macron
Quelle audace ! François Médeline immerge le lecteur dans l’immédiateté d’une politique fiction incroyable et qui commence par la mort du président de la République Emmanuel Macron. Tuer Jupiter est une incroyable idée réalisée dans l’immédiateté de l’événement. Mais le roman tient-il la promesse ?
Les honneurs de la République
Tout commence avec le Président Gérard Larcher aux côtés de Brigitte Macron pendant la panthéonisation d’Emmanuel Macron. Quel héros la République pleure-t-elle ! Quelle idole le monde vient-il de perdre ! Puis tout va être raconté à rebours, et en multipliant les voix. Cette construction d’abord déroute, puis convainc un lecteur qui se laisse emporter au fil des révélations.
Emmanuel Macron a-t-il été la victime d’un attentat islamiste ? Tout laisse à le penser. Mais que sont les certitudes quand les sources remontent à un activiste nationaliste. On se demande s’il est un converti ou s’il s’est sacrifié pour désigner son ennemi ? Ou bien est-il manipulé ? Mais pas qui ? Si l’élan initial est vraiment fort, petit à petit l’intérêt s’affadi un peu et on est alors face à un scénario convenu. Les lieux, les puissances mondiales, le dessous des cartes d’un complot qui mêle les services secrets des grandes puissances et quelques officines officieuses. Mais pourquoi ?
un style particulier
François Médéline a un style très particulier. Certains disent « rock » parce qu’il parle cru et semble être dans une discussion entre potes dans un bar après quelques bouteilles (1). Les chapitres sont entrecoupés de pages de manchettes de presse ou de sms de personnalités, pour inscrire le récit dans le réel. Il faut passer ce principe d’écriture pour entrer dans le récit, sinon on risque de ne pas pouvoir dépasser les cinquante premières pages.
Malheureusement… Tuer Jupiter ne tient pas la distance, le début est vraiment bien enlevées, et promet un incroyable thriller politique. Mais le principe narratif et le style propre, ainsi que les quelques poncifs, n’ont pas réussis à nous convaincre.
Loïc Di Stefano
François Médéline, Tuer Jupiter, Points, octobre 2019, 188 pages, 6,60 eur
(1) Plusieurs effets de style nuisent à la lecture. D’abord une profusion de chapitres de phrases courtes où le sujet est répété jusqu’à la nausée : « Elle l’ajusta. Elle quitta ses gants. Elle appuya sur la pédale de la poubelle de cinquante litres, les jeta. Elle enfila une paire neuve. Elle marcha jusqu’à son meuble à secrets. Elle ouvrit les deux portes » ; « Chaque tablette pesait cent cinquante gramme. Chaque tablette était composée de quinze carré. » Etc. Ensuite une accumulation de détails techniques : « le drone multicolor OnyxStar FOX-C8-HD » ; « Elodie étudia le Bic Sensitive jetable blanc et orange sur la tablette. Le rasoir valait trente cents. ». Enfin, un style très relâché qui pourrait faire rock mais qui, quand c’est le narrateur et pas un personnage, sonne forcé et faux : « La pucelle d’Orléans lui fila la trique. […] Eric Zemmour ressemblait à une mamie perdue dans un congélo ». Etc. Bien sûr ces remarques stylistiques n’engagent que le rédacteur de l’article, d’autres apprécieront justement ce qu’il trouve être essentiellement des défauts rédhibitoires.