Semiosis, un nouveau monde

Une nouvelle auteure de science-fiction 

On ne fera pas ici d’historique de la carrière de Sue Burke, journaliste et traductrice, car Semiosis est son premier roman, qui a d’ailleurs rencontré un certain succès outre-Atlantique. Elle a choisi de raconter la création d’une colonie humaine sur la planète Pax. Le roman est découpé en sept chapitres et se déroule sur un siècle (en temps de la planète Pax) avec l’histoire des générations qui se succèdent via les récits des personnages principaux. 

Une lente acclimatation 

On s’était réveillés, vaseux et transis de froid, les muscles, le cœur et le système digestif atrophiés après cent cinquante huit ans d’hibernation dans un vaisseau spatial minuscule. L’ordinateur nous avait mis en orbite et envoyé un message à la Terre avant de nous administrer nos injections. » 

On découvre les efforts des premiers colons dans un environnement nouveau et hostile via le récit du botaniste Octavo. Ce dernier a le défi d’essayer d’expliquer la végétation de Pax et surtout les Lianes blanches qui semblent douées d’une forme d’intelligence. La seconde histoire est celle de Sylvia, une des enfants des premiers colons. Elle découvre une cité ancienne où réside une intelligence végétale, le bambou, prête à les accueillir. Sylvia convainc les « enfants » nés sur Pax mais pas la majorité des « parents ». Elle doit résoudre ce problème par la force en tuant Vera, la première « modératrice » de la communauté.

Trente ans plus tard, on fait la connaissance d’Higgins qui a développé des liens avec des animaux de la planète, baptisés chats et lions, tout en étant un des rares mâles fertiles de la colonie. Il peut ainsi coucher avec toutes les femmes qui le souhaitent, sans en avoir aucune avec lui. Le lien avec le bambou se développe : celui-ci, devenu citoyen de la communauté, apprend le langage humain et essaie d’améliorer le sort de la colonie. Mais quand les fondateurs de la cité, les verriers, reviennent, la colonie va devoir utiliser la violence, risquant ainsi de bafouer ses principes… 

Un premier essai convaincant 

Semiosis est un roman plutôt réussi, malgré la difficulté à gérer plusieurs personnages principaux dont un totalement non humain. On retrouve ici la thématique du premier contact marié au souci de décrire une communauté fondée sur une utopie. Les habitants de Pax, qui disent s’appeler les pacifistes, ont décidé de rompre avec la violence, la guerre, l’argent, pour vivre en bonne intelligence avec la nature. Certains diront que c’est un roman écologiste pour bobos ! Reste que la description de cette communauté est assez réussie. Elle offre une alternative aux classiques romans de science-fiction fondées sur des anticipations technologies et « technicistes » (pas toutes, songeons au cycle de Pern d’Anne Mc Caffrey) tout en se fondant aussi sur certains « topos » de la culture américaine qui, rappelons-le, s’est fondé sur le rejet de l’Europe et se voulait un « nouveau monde ». Semiosis renvoie aussi à l’angoisse humaine, si humaine, devant l’inconnu.

Un bon roman plein d’actualité et doté d’une superbe couverture de Manchu. 

Sylvain Bonnet 

Sue Burke, Semiosis, traduit de l’anglais par Florence Bury, illustration de couverture de Manchu, Albin Michel, « Imaginaire », septembre 2019, 448 pages, 24,90 eur

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