Gaëlle Perrin-Guillet, La Régulation, une ville sous contrôle

Après s’être plongée dans le crime londonien, puis le steampunk, Gaëlle Perrin-Guillet s’est lancée dans un récit dystopique qui postule une société humaine postapocalyptique. Thème connu, mais La Régulation est un huis-clos qui vient bousculer les codes…

Sous le règne des Dix

Trois siècles après, la terre est encore inhabitable. L’humanité est retranchée dans une ville labyrinthe protégée derrière d’immenses murs infranchissables. Dehors ? Nul ne le sait, mais les bruits qui s’entendent parfois font froid dans le dos. La société humaine est organisée en strates, avec à son sommet les élites que personne ne voit jamais, mais dont les décisions ne sont pas sujettes à discussion. Et leur armée de drones veille à la bonne exécution de leurs décisions.

Une des règles de cette vie, c’est la régulation : chaque habitant peut être désigné comme traqueur ou cible, lors de période où les uns vont tenter de tuer les autres, pour échapper eux-mêmes à une mort certaine. Au terme de cette épreuve, il ne devra rester qu’un survivant, et ceux qui refusent de participer ne survivront pas aux drones, leur famille non plus… Ainsi la population se maintient à l’équilibre, et les Dix, le conseil invisible des dominants, règne par la terreur.

Tant qu’à mourir…

La vie est loin d’être heureuse, tout le monde est sous surveillance, mais la vie se prolonge, malgré tout. A l’abri dans l’enceinte de cette cité fortifiée. A l’abri de la menace extérieure… Et la menace intérieure, quand sonne l’heure de la régulation, et que son voisin, son amant peut-être même, pourrait vouloir sauver sa vie au prix d’un sang jusqu’alors chéri.

Mais cette vie d’injustice est devenue insupportable à un petit groupe de marginaux. Tant qu’à mourir, autant que ce soit dans l’action en quête de vérité, et non par l’arbitraire d’une décision souveraine… D’autant qu’ils auraient découvert un secret, et une voie d’accès aux étages supérieurs. Les Dix les laisseront-ils gravir le sommet du mur ? Quelle vérité se cache au somment, comme un Mont Olympe dominant un peuple sur laquelle parfois la foudre tombe arbitrairement, pour rappeler qui est le maître ?

Ces petits airs de Silo et de La Purge, voire d’Hunger Games, ne doivent pas perturber le lecteur. Car la force incroyable de La Régulation est ailleurs. C’est un roman sur la liberté, la révolte, et l’espoir. Un roman qui fait réfléchir à l’ordre établi et au diktat d’une caste sur une masse indifférenciée de personnes dont on peut programmer l’exécution, et même, orchestrer une auto-régulation… C’est un roman que les adolescents devraient s’arracher, et les adultes aussi. On rêve de voir une adaptation en série tant il est ingénieux et profond, tant les personnages sont bien construits et attachants. La Régulation est une vraie belle réussite.

Loïc Di Stefano

Gaëlle Perrin-Guillet, La Régulation, Fleuve éditions, “outre fleuve”, mai 2024, 224 pages, 19,90 euros

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