La dynamique du chaos, le roman de l’underground

Un combat sans fin pour un ancien soldat

Dynamique du chaos est le premier roman de Ghislain Gilberti. C’est un roman lourd, difficile, largement autobiographique et d’autant plus noir. Sa publication est à l’image de sa vie, un parcours du combattant. Refusé par un grand nombre d’éditeurs, malgré la suppression de passages pouvant être estimés choquants, Ghislain Gilberti en publie gratuitement la version « allégée » sur Internet. C’est un succès fulgurant ! Et la maison d’édition Ring le publie, en version non expurgée, en 2017. Dès lors, Ghislain Gilberti devez un auteur qui compte dans le paysage du polar français.

Ex inferno, histoire d’un rescapé des tréfonds de la société

Gilberti ne cache à aucun moment le côté autobiographique de son roman, car dès le début, il met en scène son principal protagoniste, Gys, polytoxicomane dont la principale drogue ne se résume pas à celle qu’il se balance dans le nez. Sa principale drogue est en fait une femme, Séverine, dont il se sépare mais dont il ne guérit pas, et qui se retrouve inéluctablement sur son chemin.

Pour tenter de se détourner de cette addiction humaine, il va tenter presque toutes les autres, et toucher le fond du trou, mais pas version Alice au pays des merveilles (1). 

Il se décrit comme la « Génération Nada », et consomme avec excès tout ce que les bas fonds peuvent proposer, avec violence, perdu dans cette spirale infernale dont il tire pourtant des satisfactions de courte durée, le temps des effets des drogues. 

L’immersion dans l’underground

Gilberti nous permet, pour ceux d’entre nous qui ont eu la chance de ne jamais connaître l’intérieur de cette société souterraine, d’y découvrir cet environnement violent, régi par des règles brutales, sans condition ni compromis, où rien n’y est interdit dès lors que l’on en tire du plaisir. C’est dur, impitoyable, et Gys évolue dans ce milieu avec une aisance parfois simulée, mais l’on comprend qu’il en connaît toutes les ficelles. 

Certaines scènes, notamment sexuelles, sont à la limite du supportable pour le citoyen moyen. Il n’est donc pas à mettre entre toutes les mains ! Mais cette vie existe, Gilberti expose cette société qui survit grâce à des substances chimiques car consciente qu’elle n’a aucun avenir. De quoi bousculer les idées des rêveurs ( inconscients, ou qui préfèrent se mentir) qui pensent que tout va bien sans risquer un oeil en dehors du balcon de leur maison somptueuse payée avec un crédit sur 25 ans (ou en cash pour les plus chanceux). 

Une histoire sans aucune concession

Gilberti nous embarque, on s’essuie le nez machinalement lorsqu’il décrit les rails qu’il s’envoie dans les narines, on est vaseux comme lors de ses réveils de lendemain de cuites de toutes sortes. Ce roman m’a transportée, dans un milieu que je ne connais que du point de vue extérieur des forces de l’ordre, et je comprends mieux beaucoup de choses, son ressenti, sa colère, cette putain de rage qui le fait avancer presque malgré lui, alors qu’il est en pleine chute. 

On ne ressort pas indemne de ce roman, mais le pire est que malgré cette noirceur, cette violence, ce sexe sans plaisir, ses substances toxiques pour l’âme et le corps, dans un petit coin de cette histoire, on y trouve l’amour, le plus sauvage et indestructible au monde.

Et c’est là que la phrase « jusqu’à ce que la mort nous sépare » prend tout son sens…

Minarii Le Fichant

Ghislain Gilberti, Dynamique du chaos, La Mécanique générale, mars 2018, 421pages, 9,90 eur

(1) Référence à son roman percutant Dernière sortie pour Wonderland.

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