La Cachette, Jean-Pierre Andrevon se glisse sous le lit
Après un braquage raté, Jack Frazzetta, le narrateur, se retrouve blessé, poursuivi par la police et seul. De ses deux camarades, l’un a pris une balle, l’autre s’est barré en vitesse. Jack traverse les rues et les terrains vagues jusqu’à déboucher dans un quartier résidentiel pauvre et paumé. Une fenêtre ouverte, il entend la police et ne réfléchit plus : le voilà caché sous un lit qu’il pensait inoccupé mais qu’une femme malade garde toute la journée. Ainsi s’ouvre La Cachette, incroyable huis-clos où Jean-Pierre Andrevon montre l’étendu de son art.
Jack s’installe à la fois sous le lit et dans sa propre mémoire. Cet épisode insolite de sa vie d’adulte lui rappelle ces moments où, fuyant un père violent, il se cachait sous le lit, comme tous les gamins l’ont fait. Si bien que le récit improbable devient aussi la reconstruction d’une mémoire. Celle de l’enfant que Jack était. Mais avec le temps qui passe — et le lecture sera surpris d’admettre qu’il passe ainsi… — Jack se met à vivre tous les moments en même temps… Mais il joue aussi avec la mémoire lecteur, qui a fait de sous le lit sa cachette favorite également, mais qui a subit le monstre qui s’y cachait ! En inversant les positions, Andrevon donne corps au fantasme infantile majeur et lui donne une nouvelle dimension.
Andrevon excelle à tirer le fil d’un micro-événement et à enrouler son lecteur avec. Si l’on se demande vite comment il va tenir deux cents pages avec une intrigue aussi fine, un lieu aussi incongru, et un héros si peu charismatique, plus on avance dans la lecture et plus on est bluffé par la manière dont il nous emporte bien au-delà de l’espace réduit et pour un twist final inattendu. La Cachette est un vrai traquenard, qui fonctionne parfaitement, et dans lequel on a été ravi de se faire perdre !
Loïc Di Stefano
Jean-Pierre Andrevon, La Cachette, H&O, juillet 2019, 249 pages, 7,90 eur