La guerre mondiale des Romains, grand jeu à l’antique
Professeur d’histoire à Sorbonne Université et spécialiste d’histoire militaire, Giusto Traina s’est fait connaître avec 428, une année ordinaire à la fin de l’Empire romain (Les Belles Lettres, 2010) et avec Histoire incorrecte de Rome (Les Belles Lettres, 2021). La guerre mondiale des Romains se propose de revenir sur les années de la fin de la République, de l’assassinat de César à la mort d’Antoine (de -44 à -30) avec une perspective originale.
La perspective mondiale de la guerre civile
Giusto Traina a raison sur un point : les guerres civiles n’ont pas impliqué que des romains. Octavien, Antoine, Brutus, Cassius et les autres ont recruté nombre d’étrangers dans leurs troupes. Ils se sont aussi appuyés sur des royaumes clients, comme la Judée d’Hérode : ce dernier manœuvre pendant ces années très habilement, obtenant son titre de roi d’Antoine qui l’aide à battre son rival Antigone. S’il envoie un contingent au moment d’Actium à Antoine, il abandonne vite ce dernier et rallie Octavien sans encombre. L’Arménie d’Artawazd joue un rôle ambigu. État tampon entre Rome et l’empire parthe, il oscille entre les deux. Antoine sécurise la Syrie mais échoue à envahir l’empire parthe pour venger Crassus. Il réussit cependant à occuper l’Arménie.
La grande confrontation
Reste que cette période est marquée par le choc d’ambitions romaines. Et nombreux sont les acteurs. Le fils cadet de Pompée, Sextus, réussit à occuper la Sicile pendant plusieurs années, gênant le jeu des triumvirs qui en viennent (provisoirement) à pactiser avec lui. Et puis il y a les césaricides qu’Antoine bat à Philippes. Ils ne manquaient ni d’intelligence, ni de soutiens. L’un d’entre eux, Quintus Labienus, rallie même les Parthes et gêne l’action d’Antoine en Orient. Reste que le grand jeu entre Octavien et Antoine, tous deux issus du camp césarien, monopolise de plus en plus le jeu politique romain. L’habileté d’Octavien est d’avoir réussi à imposer son récit (Occident contre Orient, Romains contre Égyptiens), y compris à l’historiographie romaine.
Excellent ouvrage, écrit de façon claire et précise.
Sylvain Bonnet
Giusto Traina, La guerre mondiale des Romains, Fayard, janvier 2023, 320 pages, 22,50 euros