Le Seigneur des anneaux, l’intégrale dans la poche
Publié en trois volumes séparés en juin 2025 dans la collection de poche « folio », la nouvelle traduction de l’œuvre la plus célèbre de J.R.R. Tolkien, Le Seigneur des anneaux, bénéficie à présent d’une édition intégrale très soignée au format de (très grosse) poche. Un seul mot d’ordre : admiration !

« Un anneau pour les gouverner tous. »
Depuis les films de Peter Jackson, la trilogie de l’Anneaux est entrée, encore un peu plus, dans la culture populaire. Bien sûr, il y a adaptation et sélection d’éléments qui servent à la narration choisie par le réalisateur, et les puristes qui s’offusquent. Mais le fait est là, c’est une pierre de plus dans l’édification de la légende. Bien sûr, des personnages d’une puissance incroyable (la complexité du maléfique Sauron fait de lui le plus grand des « méchants », tout comme la noblesse d’âme d’Aragorn fait de lui un modèle pour les saga ultérieures), un voyage épique et homérique avec un aller-retour initiatique, des décors immersifs, des créatures enchanteresses… et la puissance d’un vaste monde qui vit, littéralement.
Le « précieux » est à la croisée des chemins culturels de l’Europe ancestrale et porte tout le mépris de l’auteur pour la guerre — qu’il vécu dans sa chair — et pour l’industrialisation qui n’est pas un progrès si la nature et la nature humaine même sont détruits. Cette fable joue sur tous les codes du médiéval fantastique pour imposer une morale progressiste : c’est en s’unissant que les adversaires par nature (nains et elfes, par exemple) et tradition peuvent combattre le mal, et c’est à) ceux qui sont le plus proche de la nature (les Hobbits) de guider les peuples vers un âge de renouveau, un regain où la paix peut naître. Autant dire, pour ceux qui découvriront le texte avec cette belle édition, que Le Seigneur des anneaux n’est pas qu’un récit de batailles devant les forteresses où l’humanité joue son avenir et que les magiciens font autre chose qu’un peu de lumière avec leur bâton !
Une œuvre littéraire
Le Seigneur des anneaux est un grand roman, au sens premier du terme. Sa longévité tient sur la qualité d’écriture, et la matière colossale sur laquelle Tolkien s’appuie pour imposer sa propre univers (mythologies, cultures, traditions, langues, etc.). Une œuvre ne survit pas aux modes si elle ne parle pas à chacun, ce qu’un classique sait seul faire, et en ce sens aussi il s’agit incontestablement d’un classique, traduit dans plus de 70 langues !
Louons également le très beau travail de Daniel Lauzon qui s’attaque à un monument sans le dénaturer. Il travaille à partir de la dernière version du texte original, tient compte des indications laissées par Tolkien à l’intention des traducteurs et les découvertes permises par les publications posthumes proposées par Christopher Tolkien.
Source d’inspiration de tout ce qui s’est écrit dans le domaine du médiéval fantastique après lui, admiré par de grands auteurs comme Julien Gracq, Le Seigneur des anneaux est un voyage dans lequel plonger avec jubilation.
Loïc Di Stefano
J.R.R. Tolkien, Le Seigneur des anneaux, l’intégrale, traduit de l’anglais par Daniel Lauzon, sous la direction scientifique de Vincent Ferré, Gallimard, « folio », novembre 2025, 1472 pages, 24,90 euros
