Les couloirs aériens, la crise de la cinquantaine

Ceux qui viennent de passer le cap des 50 ans risquent de se retrouver un peu, voire beaucoup, dans Les Couloirs aériens. Etienne Davodeau, star des romans graphiques chez Futuropolis, embarque deux vieux comparses de trente ans pour co-écrire cette réjouissante fresque de vie.

Evidemment, avoir cinquante ans c’est un truc dont on peut se foutre. Ça arrive à plein de gens et ça fait marrer ceux qui sont bien au-delà.

Bilan de vie désabusé

Yvan est peut-être un jeune cinquantenaire mais vieux dans sa tête, même si quelques soubresauts d’homme rebelle reviennent à l’assaut.

Il arrive dans un petit village du Jura en plein hiver, la beauté de cette nature enneigée n’a pas l’air de lui remonter le moral et pour cause : il vient de passer le cap des 50 ans, il a perdu dans une période courte sa mère et son père, ses enfants sont grands et vivent leurs vies et il vient de perdre son boulot. Etre heureux en ménage aurait pu le sauver, mais comble de la vie, sa femme est partie travailler à l’autre bout de la planète.

Il vient de vider la maison de ses parents pour la vendre et se retrouve maintenant avec une montagne de cartons qui ne peuvent que le renvoyer à son histoire personnelle, son enfance, ses parents, en exhumant ses souvenirs.

Heureusement l’amitié compte beaucoup pour lui, on lui prête une maison appartenant à Thierry l’un de ses vieux copains qui habite à deux pas. Ce dernier et son fils essaient tant bien que mal de le secouer et de le ramener à la raison en tout cas vers les pentes du bonheur.

Ce séjour va-t-il lui permettre de lui redonner suffisamment d’élan pour chercher du travail, reconquérir sa femme, ou alorss’enfoncer dangereusement vers la dépression ?

Fresque philosophique épique, de la morosité à l’espoir

Tout est possible quand on est jeune, les perspectives paraissent sombres en passant ce cap symbolique mais l’espoir naitra un peu de soi et surtout beaucoup des autres, telle pourrait être l’approche philosophique d’Etienne Davodeau.

C’est avec sa bande de potes qu’Etienne Davodeau qui a lui-même passé cette phase de la vie, conçoit cette fresque sympathique. Sous ses airs de scénario assez simple il revêt des rebondissements mais surtout beaucoup d’humour. 

Le ton utilisé est singulier pour ne pas dire franc du collier avec un soupçon d’insolence mais toujours avec beaucoup d’indulgence. Les pics assénés sont acérés et souvent sans bienveillances ce qui rend très drôle les échanges entre les protagonistes.

Bien sûr il faut également parler du dessin. Et en particulier de la campagne et des forêts enneigés qu’Yvan a pris l’habitude de parcourir pour se changer les idées, au risque de se perdre. En tout cas, ces étendues blanches amènent de la sérénité à cette histoire mélodramatique.

A noter l’idée insolite de glisser des planches de photos au cœurs de l’album. Ces photos représentent des souvenirs, objets passés, futiles ou désuets. Ils étonnent à la première page mais au final se révèlent être une brillante idée. Ils nous rappellent notre enfance à nous aussi ou la vie de nos aïeux passés et souvent oubliés.

Xavier de la Verrie

Etienne Davodeau (scénario & dessin), Joub (scénario), Christophe Hermenier (scénario & photos), Les Couloirs aériens, Futuropolis, octobre 2019, 112 pages, 19 eur

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