De l’aube à l’aube, Bashung l’immortel

Retour sur un grand artiste 

Il sera toujours difficile de parler d’Alain Bashung, décédé en 2009 (soit il y a de dix ans), au passé tant l’œuvre et d’immortelles ritournelles continuent de rythmer la vie de pas mal de gens. De l’aube à l’aube est la retranscription d’une émission diffusée sur France Inter (mais pas seulement) où intervenaient des personnalités ayant connu et/ou travaillé avec Bashung, sorti aux éditions Page à page en 2018  et publié ici en poche dans la collection Points des éditions Seuil. Tout y passe, de sa vie personnelle à la genèse de ses plus grands disques. Qu’en retenir ? 

La réussite d’un marginal 

En fait, Alain Bashung part de très loin, on peut même dire qu’il aurait pu se suicider ado ! Elevé en Alsace par ses grands-parents paternels, ses parents s’occupent peu de lui et il apprend à l’adolescence que son père n’est pas son père. Imaginez le choc pour cet adolescent dont la première langue est l’alsacien : toute sa vie d’avère un mensonge ! Bashung, être pudique, reviendra peu sur cet épisode mais il est fondamental pour le comprendre. Sa chance est la musique en général (son père adoptif lui a offert un harmonica) et le rock en particulier.

Le jeune Alain monte à Paris et forme des groupes, joue, chante, fait des 45 tours… Mais ça ne marche pas. Inexplicablement, la mayonnaise ne prend pas. Bashung apprend le métier, devient producteur de Dick Rivers, joue dans une comédie musicale. La trentaine arrive. Heureusement, le déclic est proche. 

Le succès et ses dérives 

Bashung se découvre un premier partenaire (et frère d’adoption) en la personne de Boris Bergman, qui s’est fait un nom avec Rain and Tears d’Aphrodite’s child. Bergman écrit une partie des textes de l’album Roulette russe, qui est un échec. Si Bashung veut réussir, il lui faut un tube : ce sera Gaby oh Gaby, texte aux résonnances multiples, idéal pour un artiste passionné par les jeux de mots. Il y aura ensuite Vertige de l’amour mais le duo craque : Bashung part travailler avec Gainsbourg, un maître, sur l’album Play blessures. Echec commercial mais il y gagne en crédibilité. Le duo se reformera (je laisse le lecteur en découvrir les circonstances) mais pour peu de temps. Bashung part vers d’autres horizons. 

Naissance d’un monument

D’Osez Joséphine à L’Imprudence, on a affaire à un sans-faute. L’homme prend des risques, musicaux et textuels (il faut ici saluer le travail du parolier Jean Fauque). Il est enfin reconnu comme un grand interprète. Pour autant, il connaît de graves problèmes privés dû à son alcoolisme récurrent. Bashung triomphe en tout cas sur la scène francophone, sachant tirer le meilleur de ses collaborateurs à la manière d’un David Bowie.

De l’aube à l’aube est une excellente introduction à l’œuvre d’Alain Bashung. Mais posons-nous maintenant une question : a-t-il été remplacé ? en tout cas, il nous manque, cet Immortel.  

Sylvain Bonnet 

Alain Bashung, De l’aube à l’aube, Points, préface de Dominique A, octobre 2019, 264 pages, 7 eur

Laisser un commentaire