Les vagues reviennent toujours au rivage de Xavier-Marie Bonnot
Qu’est-ce qui pourrait bien faire sortir un vieux flic de la crim’ en retraite, réfugié sur son bateau… depuis peut-être trop longtemps ? Après son excellent Nerfertari Dream, Xavier-Marie Bonnot revient avec un roman policier plus proche de nous et s’inspirant de drames récents en Méditerranée. Les vagues reviennent toujours au rivage prend en effet pour sujet les naufrages de migrants.
Traverser la Méditerranée
De Palma avait déjà endossé cette posture du flic trop habitué aux férocités du monde, sans illusion, parfois cynique qui se renie, se dit-il avec amertume. Maintenant qu’il est trop tard.
Amira est une miraculée. Rescapée des bombes de Raqqa en Syrie, elle est ensuite sauvée des eaux en Méditerranée. Puis elle disparait, mais qui s’en soucie ? C’est la quête du commissaire en retraite De Palma : il vient d’apprendre le décès du docteur Thalia Georgius, son amour de jeunesse. Après qu’on l’ait retrouvée dans son appartement de Marseille, il est convaincu de son empoisonnement alors que ses anciens collègues vont clore l’enquête pour suicide. Il va donc remonter les différentes pistes car, têtu, il n’accepte pas cette thèse. Il est convaincu que celle qui a voué sa vie aux missions humanitaires en Méditerranée a dû croiser le chemin de funestes personnages. Et son point de départ de son enquête n’est autre que la fameuse Amira qui a laissé une trace plus indélébile que son sang : ses écrits, son récit de vie. Celle d’une jeune fille vendue par sa mère pour 8.000 $, une somme incongrue. Un nouveau meurtre vient relancer la quête de De Palma, celui de Andrea Kannakis, activiste de Lesbos pro-migrants, retrouvé pendu à un mat d’un navire à quai. Tout cela l’amène vers les bas-fonds de la traite d’esclave et aussi à rencontrer de violents groupuscules d’extrêmes droites.
Un roman politiquement engagé
À ton avis, est ce que j’ai déjà tué des hommes dans ma carrière de flic ? le skin recule pose ton bâton pauvre clown il est 2 autres, vous levez les mains bien haut et vous avancez un peu.
L’auteur, également réalisateur de documentaires, s’inspire d’une cruelle actualité. Il ne se passe plus un jour sans que nous le voyions sur nos écrans ces exilés du continent africain, sans à force y prêter garde ou intérêt. Notons aussi que Xavier-Marie Bonnot utilise pour la septième fois le personnage du commandant De Palma dans ce roman policier d’investigation. Ce vieux flic, qui vit reclus, a trouvé une occupation dans laquelle il va se plonger corps et âme. Il nous montre qu’apparemment on reste flic toute sa vie avec une facilité à vouloir défendre les opprimés, une chose au fond très réconfortante.
Xavier-Marie Bonnot a construit un roman où l’on ressent une certaine lassitude, peut-être à cause de ce personnage légèrement bougon et désinvolte. c’est en tout cas un roman policier que l’on prend plaisir à lire, une histoire d’investigation classique, sans heurts et sans sang, proche certainement de la réalité mais qui n’évite pas un certain manichéisme. En tout cas pas de trash, ni de morbide : c’est devenu rare dans le genre. Tant mieux, me dira-t-on.
C’est tout le prix de Les Vagues reviennent toujours au rivage de Xavier-Marie Bonnot.
Xavier de La Verrie
Xavier-Marie Bonnot, Les Vagues reviennent toujours au rivage, Belfond, janvier 2021, 304 pages, 19 euros