L’obscur, le terme de notre société

Enseignant de profession, Philippe Testa vit à Lausanne et a déjà publié plusieurs romans dont Sonny qui a obtenu le prix des Romands 2010-2011. L’obscur est déjà paru chez Hélas éditeur en 2020 et nous présente, on va le voir une anticipation très troublante de notre avenir.

Un monde qui approche de sa fin

Je mène une vie très conforme, sans surprises et sans remous, même si – les news-break ne parlent que de ça – le monde semble de plus en plus agité. Les jours se ressemblent et ne laissent pas de traces, à peine l’attente du prochain day off. 

Nous voici donc quelques dizaines d’années dans le futur en Suisse dans une ville près du lac Léman. Le narrateur est un mathématicien complètement inadapté à la vie sociale, travaillant pour une boite informatique (mais ce n’est pas clair). Solitaire, il ne parle au travail qu’avec son collègue Moro, qui juge que le monde va à sa perte. Et les choses commencent à aller mal : les pannes d’électricité se multiplient, les émeutes aussi et la Terre n’a plus de nouvelles de l’expédition martienne. Au travail tous ont peur d’être requalifiés (c’est-à-dire licenciés). Le narrateur s’accroche à son quotidien, surtout qu’il renoue avec la seule femme qu’il a aimée, Pia.

Les catastrophes succèdent aux catastrophes et bientôt tout s’écroule et c’est le retour de la barbarie…

Un roman de l’apocalypse

Les heures s’effondrent les unes sur les autres, à la suite, imperturbables, enterrant la ruine de mes jours. Le vide se déploie sur l’horizon. Un crépuscule flamboyant, des hémisphères de pure lumière et l’oubli de tout. 

L’obscur est un roman de la fin du monde, le nôtre en fait. Philippe Testa décrit un futur possible de notre société, où le capitalisme a tout envahi avec ces anglicismes barbares (workers, day off…), son obsession de la performance… cette société finit par s’effondrer après quelques catastrophes naturelles mais surtout, semble nous suggérer l’auteur, à cause de la pulsion de mort qui nous envahit face à des vies aussi vides. On songe à un autre roman, Le paradoxe de Fermi de Jean-Pierre Boudine, qui décrivait le même phénomène.

L’obscur ne laissera pas indifférent, on le referme avec un certain frisson…

Sylvain Bonnet

Philippe Testa, L’obscur, Gallimard, « Folio SF », illustration de couverture d’Aurélien Police, février 2022, 224 pages, 7,60 euros

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