Marc Francelet, l’aventurier entre la réalité et sa propre fiction
J’ai vaguement connu Marc Francelet du temps où il frayait dans le sillage de Belmondo. Je me souviens à peine d’une ou deux rencontres fortuites et de quelques conversations téléphoniques censées me remettre à ma place. Tout cela reste flou. Et j’ai, sans doute, été plus impressionné par la puissance de ses voitures que par sa personnalité… Pour dire vrai, je n’ai pas vraiment d’opinion sur lui, ne l’ayant pas suffisamment connu. En revanche, je sais qu’il est un des hommes les plus unanimement détestés que j’ai croisés et cela seul devrait suffire à me le rendre sympathique…
un héros sans charisme
Marc Francelet est peu connu grand public. À l’exception des spécialistes des affaires économico-judicaires car il s’est retrouvé plus d’une fois devant la barre des tribunaux et, par voie de conséquence, derrière les barreaux.
Il se définit lui-même comme un aventurier. Pourtant, il n’a rien d’un Indiana Jones ni d’un Sam Lion. Il serait plus proche d’un pirate des Caraïbes, le charisme en moins.
Officiellement, c’est un journaliste. Officieusement c’est un homme de l’ombre qui a traîné dans de nombreux coups, pas toujours glorieux. Encore ne les raconte-t-il pas tous.
Sous la lumière, il fut l’ami de Johnny Hallyday, Jean-Paul Belmondo et Françoise Sagan. Hélas pour lui, les deux premiers coupèrent les ponts non sans une certains violence (au moins verbale). Quant à la dernière, Francelet préféra s’en éloigner sentant la présence de la mort se rapprocher. Dans le clair-obscur, il s’est mêlé de divers dossiers en de nombreux coins du monde…
Premiers pas
Or donc, il a commencé par des scoops pour Paris Match, à une époque où ce magazine ne se contentait pas d’interviewer des soi-disant célébrités et osait secouer le cocotier. Jeune, Francelet, gagna quelque argent en proposant des clichés inédits. Il aurait pu s’en contenter. Pas son genre. Dans le même temps, il se spécialisa dans le trafic de tableaux. Récupérant des œuvres volées pour les fourguer à un authentique marchand d’art. Trafic financièrement juteux mais juridiquement douteux. Cela lui valut son premier séjour en prison.
À partir de là, Francelet fit feu de tout bois : conseiller en communication pour des personnalités ou des pays ayant besoin de redorer leur blason, simili trafiquant d’armes, propriétaire éphémère d’un puits de pétrole… en Irak ! La liste est aussi longue qu’édifiante.
Il a déjeuné quatre heures durant avec François Mitterrand qui a usé (et abusé) de sa toute-puissance pour lui débloquer un dossier, il a sauvé Johnny d’une accusation de viol, il a traficoté du côté d’Israël…
Tout cela, il le raconte dans son livre que d’aucuns attendaient depuis longtemps. Oui, il contient des révélations, mais non il n’y a pas de quoi sauter au plafond. C’est la vie d’un homme avide d’argent autant que de sensations fortes qui s’ennuie dès qu’il se retrouve seul face à lui-même.
trafic en carambouille
D’aventure en aventure, de trafic en carambouille, il dévoile diverses affaires sans forcément entrer dans les détails. C’est une autobiographie donc c’est lui qui contrôle et qui, de temps en temps, s’arroge le beau rôle.
Il faudrait un spécialiste — que je ne suis pas — pour décortiquer l’ensemble ligne par ligne. Mes connaissances se limitent à Belmondo et Johnny et les portraits qu’en fait Marc Francelet ne me surprennent pas. Ces stars sont — ou ont été — capables du meilleur comme du pur mais leur statut donna à ces deux extrêmes des ampleurs hors du commun. Les rapports entre Johnny et Laeticia peuvent faire sourire, de même que ceux de Belmondo avec l’argent.
Bien sûr, j’aurais aimé qu’il nous en dise plus sur ces deux personnages. Plus d’anecdotes, plus de détails inattendus mais, encore une fois, c’est l’auteur qui décide. Il garde en mains les cartes qu’il souhaite.
La couverture du livre fait volontairement penser à une cassette (ou DVD) des éditions René Château. C’est dire si Marc Francelet a toujours évolué entre la réalité et sa propre fiction.
Le moins que l’on puisse dire est que son parcours est hors norme. Reste la question primordiale : à la fin de la lecture allez-vous aimer ou détester Marc Francelet. Peu importe, finalement : dans les deux cas, il sera content !
Philippe Durant
Marc Francelet , L’Aventurier, Le cherche midi – mai 2021, 362 pages, 20 eur