Contre les barbares, un texte politique et partial

Un latiniste militant

On a connu Maurizio Bettini, philologue et latiniste très connu, professeur à l’université de Sienne, avec Contre les racines, publié par Flammarion en 2017. Dans cet ouvrage, il alertait contre le danger d’être obsédé par l’idée de racines culturelles, concept souvent repris par la droite et l’ultra-droite, spécialement les gréco-latines qu’il connaît bien. Il revient ici avec Contre les barbares, texte très influencé par le drame des migrants.  

Des textes anciens relus

On devine dès les premières pages un Bettini choqué par l’attitude générale des européens, des gouvernements en particulier, face aux migrants en Méditerranée, ceux qui meurent noyés surtout. Alors, il convoque Homère et Virgile pour nous parler d’un passé qui devrait nous parler. Chez Virgile, Énée et ses compagnons furent recueillis par Didon, reine de Carthage, et traités en égaux. Et Ulysse et ses pérégrinations ? Puis il fait appel à Sénèque aussi. Bref, Contre les barbares est une charge sévère contre les européens.  

Un texte typique de la défense de l’immigration

Donc, si on suit Bettini, si nous voulons être fidèles aux anciens (ceux-là même invoqués par certains pour justifier de racines gréco-latines), nous devons secourir les migrants et puis les accueillir. Le secours est un devoir. Soit. Quant à l’accueil, encore faudrait-il savoir de quel accueil on parle. À aucun moment ici, on ne parle des conséquences de l’installation de populations entières dans des pays d’accueil fragilisés par la crise économique (et la COVID ne va rien arranger). On ne parlera pas non plus de l’attitude de certains migrants face aux femmes, comme à Cologne au nouvel an 2016. On ne parlera pas non plus de l’Islam et de l’identité islamique, prégnante chez la majeure partie des migrants et invoquée par la minorité terroriste qui a encore frappé récemment, à Nice notamment.

Bref, Contre les barbares est un texte d’émotion, volontiers moral et moralisateur qui instrumentalise l’héritage antique dans un but idéologique. Et c’est tout. On a donc aussi  le droit de rejeter ce discours.        

Sylvain Bonnet

Maurizio Bettini, Contre les barbares, traduit de l’italien par Madeleine Rousset Grenon, Flammarion, « champs actuel », juin 2020, 166 pages, 8 eur

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