Mécanique mort de Sébastien Raizer, le monde qui vient

Un auteur qu’on attend

On a connu Sébastien Raizer comme traducteur et romancier (L’alignement des équinoxes). Puis on a lu Les nuits rouges, roman noir pur sur la destruction du tissu social à Thionville en Lorraine avec la fin de la sidérurgie et aussi portrait de deux jumeaux, Alexis et Dimitri Gallois, pris dans une spirale qui les dépasse et obsédés par le meurtre de leur père syndicaliste dans les années 70. Seul Dimitri, à l’issue de ce roman et après avoir tué Saïd, son ancien dealer, survit et part, au grand bonheur d’un policier, Keller. Voici Mécanique Mort, la suite des Nuits rouges, qui raconte son histoire.

Le retour de l’enfant prodigue

« Les affaires du monde emmerdaient souverainement le commissaire Simon Keller. Il se calmait en pensant à l’annihilation prochaine de l’humanité. »

Keller en a vu des pas mal. Son rôle est de maintenir un semblant d’ordre dans une région sinistrée. Trois ans auparavant, l’affaire Gallois a failli lui coûter cher mais il a accepté d’aider Dimitri, qui a endossé l’identité de son frère Alexis après sa mort et surtout de le laisser s’évanouir dans la nature. La criminalité a repris ses droits, la femme de Keller l’a quitté (il lui reste les chats) et la sœur de Saïd, Nesrine, a repris le business. Mais il y a de nouveaux problèmes : le Fentanyl, une nouvelle drogue, fait des ravages. Probablement introduite par la mafia albanaise. Et voilà Dimitri qui revient, après un tour comme marin autour du monde, pour protéger sa mère entre autres. Et régler ses comptes avec son passé, quitte à passer un accord avec la ‘Ndrangheta. Parce que pour le monde, ben tout est foutu, pas vrai ?

Un résultat explosif

Mécanique mort raconte le monde tel qu’il est et le monde tel qu’il vient. Décomposition des états, prolifération des mafias, montée de la drogue… On peut dire qu’on ressort du bouquin avec une envie de Whisky, pour oublier la noirceur du monde. Raizer a beaucoup progressé dans ses ambitions narratives depuis ses premiers romans et sait nous parler. On ne peut que vous recommander la lecture saine (mais sans espoir inutile) de Mécanique mort.

Sylvain Bonnet

Sébastien Raizer, Mécanique mort, Gallimard « série noire », mai 2022, 416 pages, 19 euros