Michaël Lonsdale, un pèlerin à Tibhirine

Qui a oublié l’interprétation magistrale de l’acteur Michaël Lonsdale, incarnant à l’écran Frère Luc dans Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois ? C’est sous la forme de bloc-notes que l’acteur, par ailleurs auteur de plusieurs livres de spiritualité, revient en nous proposant ses multiples souvenirs au cours d’un long pèlerinage qu’il effectua à Pâques 2018, jusqu’au monastère de Tibhirine en Algérie.

Ce livre est un « carnet de voyage ». Ce livre raconte un voyage. Un voyage, mais pas n’importe lequel. Un voyage initiatique sûrement, un voyage de grâce très certainement. Sous la forme d’un bloc-notes, l’acteur rassemble des morceaux de souvenirs, appartenant à un pèlerinage exceptionnel. Ayant incarné à l’écran le frère Luc, le moine-médecin de la communauté « des sept frères tombés au champ d’amour durant la « décennie noire » qui ensanglanta ce pays (l’Algérie) dans les années 1990 », Michaël Lonsdale va raconter, par le menu, heure par heure, son périple amoureux et mystique.

Du 05 avril, jeudi de l’octave de Pâques, au 07 avril, samedi de l’octave de Pâques, on se met dans les pas de l’acteur, comme si ce livre était conçu comme un « compagnon de route » pour nous tous, si nombreux à n’avoir pas encore accompli ce chemin de grâce, mais souhaitant néanmoins, un jour, faire ce pèlerinage à Tibhirine. C’est grand, c’est émouvant, et même presque divin comme cheminement. C’est bien évidemment un cheminement intérieur que l’acteur nous invite à accomplir avec lui.

Son livre se présente en trois parties : la première raconte ses « pas dans ceux de frère Luc et ses compagnons, la deuxième sont des « paroles d’amour à Tibhirine » (qui est un récital s’attachant « à rendre compte du message de cette poignées d’hommes de Dieu qui ont vécu en Algérie et y ont affronté toutes les grandes questions de notre XXIe siècle : mondialisation économique, égoïsmes collectifs, revendications culturelles et extrémismes religieux… » et le troisième regroupe les témoignages de Grégor Trumel, Mgr Paul Desforges, le père Benoît Mwana Nyembo Ngitu, les Petites sœurs de Jésus du quartier de Belcourt à Alger et Michel Cool.

Entre sa visite de la chapelle où il assiste à une messe, la salle du chapitre où les moines décidèrent de rester malgré la menace qui les visaient, dans le cloître où il est impossible de ne pas penser qu’ils vont nous y surprendre, et enfin dans le cimetière où reposent les restes des sept trappistes martyrisés, l’acteur Michaël Lonsdale nous propose de biens beaux témoignages, qui racontent avec quelle ferveur, quelle foi il a accompli ce chemin spirituel, ce chemin de joie.

Mais il a aussi choisi plusieurs textes permettant d’entrer dans la spiritualité de ces moines, je pense notamment aux extraits de lettres du frère Luc, où il se livre, sans filtre :

Aussi c’est en soi que l’on se doit de faire une retraite et un lieu pour conserver la sérénité (05/03/1996). […] Je suis comme un vieux manteau usé, troué, rapiécé, mais là-dedans mon âme chante encore (24/03/1996). Nous ne sommes pas entre les mains des hommes, mais entre les mains de Dieu, et Dieu est un père, il nous prépare toujours les meilleures choses. Peut-être aux yeux des hommes ces événements sont-ils peu heureux, cependant notre vie ne s’étale pas seulement sur le plan terrestre, mais hors du temps, dans l’éternité (15/07/1990). »

Pèlerin à Tibhirine témoigne de la gratitude de son auteur. Et c’est aussi un livre aussi, avec son album-photos en couleurs. Et c’est un beau moment de sainteté et de spiritualité, avec ses moments forts, et cette mémoire vive, à chaque page, laissant place à un message d’espoir et d’éternité, qui rappelle le message du Christ lui-même :

Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. »

Marc Alpozzo

Michaël Lonsdale, Pèlerin à Tibhirine, Salvator, juillet 2018, 144 pages, 14,90 eur

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