Les Généraux russes contre Napoléon, des soldats remarquables
On oublie souvent dans l’histoire de Napoléon et du Premier empire d’évoquer ceux qui furent ses adversaires, à l’exception de Wellington, le vainqueur de Waterloo. Or, nombre de généraux russes comptèrent parmi ses adversaires les plus déterminés, en particulier Barclay de Tolly et Koutouzov en 1812. Cet ouvrage de Natalia Griffon de Pleineville, ancienne boursière de la Fondation Napoléon, vient donc combler un relatif vide historiographique.
L’ombre de Souvorov
Une première remarque s’impose après avoir lu cet ouvrage. La majeure partie des généraux évoqués a été formé à l’école de Souvorov, un stratège russe du XVIIIe siècle, mort en 1800, qui commença sa carrière pendant la guerre de sept ans et donna en 1799 bien des sueurs froides au Directoire en envahissant l’Italie (il bat le général Joubert, rival de Bonaparte, à Novi) puis la Suisse. Or, Koutouzov est formé par son aîné, qui remarque tour à tour le bouillant Bagration ou Yermolov, repère les qualités du futur hussard Koulnev, etc… On espère lire un jour sa biographie.
Des généraux de tout type
On est au fond assez impressionné par la variété des profils et des origines. D’origine écossaise, luthérien, Barclay de Tolly s’impose comme le stratège, celui qui attire Napoléon loin de ses bases dans la profondeur du territoire russe, espérant, à raison, l’affaiblir. Mais il est vu comme un étranger et le milieu des généraux réclame un chef russe : ce sera Koutouzov, le vaincu d’Austerlitz, dont se méfie Alexandre Ier, qui va être battu de nouveau à Borodino. Mais il sauve l’armée russe, qui refait ses forces ensuite. Le géorgien Bagration impressionne par sa fougue et son courage, évoquant Lannes tandis que Miloradovitch rappelle Murat. Le cosaque Platov, courageux jusqu’à l’extrême sur un champ de bataille, marquera les imaginations occidentales par son exotisme. Tous combattent aussi les turcs ou les suédois (rappelons que c’est durant cette période que l’empire russe s’empare de la Finlande). Une belle galerie de portraits donc, complétée par des émigrés français dont le plus célèbre est Langeron, officier courageux et intelligent, plein du charme et des manières de l’ancienne cour de Versailles.
Les Généraux russes contre Napoléon, très bien écrit, est plus que recommandé à l’amateur d’histoire napoléonienne.
Sylvain Bonnet
Natalia Griffon de Pleineville, Les Généraux russes contre Napoléon, Perrin, novembre 2023, 432 pages, 24 euros