On n’enterre jamais le passé, roman policier mais pas que de Nicolas Duplessier

Métaleux et enquêteur pour les compagnies d’assurance. Il y a comme un hiatus. C’est pourtant la vie de Lukas Kusner ! Et au sortir d’un concert au Hellfest (faut pas s’gêner !), son patron l’envoie dans la région de son enfance, sur la piste d’une escroquerie à l’assurance. Un faux-vol de pierres rares (des cumengéites, on en apprend des choses !), ça fait une petite somme. Le voilà donc embarqué dans une petite enquête toute simple, qui va vite se révéler tout sauf toute simple ! Alors on s’accroche, on se prépare à 200 pages débridées et, avec une bande son bien sentie, on entre dans On n’enterre jamais le passé de Nicolas Duplesier, un roman policier, mais pas que !

« La vie est une salope. On ne sait jamais quand elle va nous niquer. »

La belle cité de Fontainebleau abrite son lot de surprises. La riche famille cachée derrière les hauts murs de la propriété n’est peut-être pas la simple victime d’un vol. D’ailleurs, à part les cumengéites, rien n’a été volé. Comme s’il s’agissait d’une commande. Alors le coupable idéal est-ce le gamin loqueteux qui fricote avec Lily-Rose, la fille de la famille, archétype de la fille à papa qui se veut rebelle ? Si l’affaire de l’assurance semble vite réglée, du moins dans sa tête, Kusner tombe rapidement sur des lascars locaux, car oui, les beaux quartiers champêtres ont leur lot !

[…] tout ce que le diable invente, il ne peut s’empêcher de le tester. »

Et l’enquête dévie vers le père, soudain disparu. Le passé à ne pas enterrer serait-il celui de cet homme d’affaire apparemment bien sous tout rapport ? Les pierres précieuses sont-elles le butin ou une manière de le faire sortir de sa cachette ? Et que peut bien cacher ce décor bourgeois ? Ou bien c’est du côté du narrateur qu’il faut s’attendre à une surprise ?

« Le second degré, c’est comme le Wi-Fi, certains ont du mal à capter. »

Lukas Kusner peut paraître pénible. Et il l’est à bien des égards. C’est un sale gosse mal élevé qui se permet tout pour faire aboutir sa mission mais aussi pour le plaisir d’un bon mot. On pourrait, parfois, regretter cette propension du personnage principal. Mais, au contraire de Captain Marleau qui en devient pénible car la plupart de ses mots sont téléguidés, cela fonctionne comme un écran entre le personnage et le monde. La souffrance qu’il cache, et qui se dévoile petit à petit, se libère soudain et cloue le lecteur sur place ! Tout allait vite, tout était bien en place pour un rodéo bien rythmé et la douche glacée de la révélation vient l’interrompre, comme un coup au plexus. Puis le rodéo reprend vers une apothéose improbable mais si bien construite !

La manière très cinématographique de faire avancer l’histoire, de désigner ses personnages et les lieux au moyen de références à la pop culture principalement (cinéma, rock, séries TV) est un pari réussi. Le style est très parlé, et très rock, mais ça fonctionne. On s’attache facilement à cet enquêteur improbable, qu’on suit dans les développements de son enquête qui ressemble de plus en plus à une quête personnelle.

Nicolas Duplessier sait mêler action, humour, tendresse et faire tenir tout ensemble dans une course poursuite haletante. Un peu comme si un copain shooté s’accrochait à vous et vous racontait avec talent son very bad trip, On n’enterre jamais le passé est un vrai bon bouquin !

Loïc Di Stefano

Nicolas Duplessier, On n’enterre jamais le passé, Lajouanie, novembre 2019, 259 pages, 18 eur

Laisser un commentaire